Me voici de retour à La Gomera, logeant à quelques encablures de Hermigua, pile au milieu de cette côte nord de l’île que j’affectionne tant. Lors de mon premier séjour sur l’île, j’avais passé plus de temps à visiter et à faire les randonnées « faciles ». Le second, quant à lui nettement plus ambitieux sur la dénivelée, m’avait révélé tout le potentiel de l’île en terme de très belles randonnées mais ce séjour était trop court et en appelait clairement un autre. Il faut dire aussi que l’île a une douceur de vivre et de vie que j’affectionne tout particulièrement. J’adore Tenerife car cela reste « grand » mais le timbre poste qu’est La Gomera est une petite merveille de calme à laquelle j’aspire.
Pour fêter ce « retour », je me suis dit que j’avais très envie de refaire une randonnée de la première fois : les crêtes au dessus du Roque de Los Organos, au départ de Vallehermoso. Pourquoi la refaire ? Parce que la dernière fois, il y avait une calima (vous savez, ce phénomène sablonneux qui dore le ciel de sable et peut parfois même bloquer toute visibilité) à couper au couteau ! A tel point qu’il était tout bonnement impossible d’admirer le Roque de Los Organos et que le Roque Cano était une silhouette fantomatique dans le sable en suspension…
Alors j’ai repris le sentier, dont je me souvenais parfaitement. Le barranco qui sert de théâtre verdoyant à la première section de la randonnée, était toujours aussi superbe cinq ans après ! Ciel bleu immaculé en sus, après les grosses nuées et pluies du jour précédent. Quelques nuages d’évaporation se promènent ici et là, ne semblant pas vraiment menaçants. C’est en arrivant sur la crête que j’ai commencé à rire, un peu jaune. Point de sable cette fois-ci, mais des nuages d’évaporation, en force ! J’ai à peine le temps d’apercevoir le paysage en contrebas qu’ils semblent soudain se multiplier, proliférer même et partent à l’assaut de la crête…
Bon. C’est râpé donc. Je continue mon chemin le long de la crête, un peu agacé à dire vrai ; il va me falloir un peu de temps pour digérer la déception, c’est dans mon caractère paraît-il. Le déjeuner, dans le hameau désolé de Chijeré, se fait au milieu des nuages, bien accrochés aux falaises alors que le Roque de Los Organos se situe littéralement sous nos pieds, à portée de vue théoriquement. J’espère secrètement une disparition des nuages, à force d’évaporation mais il faut bien se rendre à l’évidence : ce n’est pas pour tout de suite.
Le sentier de crête me ramène vers Vallehermoso qui, fidèle à son nom, est de toute beauté et se permet même de baigner un peu dans le soleil. L’ambiance est un peu mystique. Entre nuages et calima, mon coeur balance, il faut croire que je ne verrai jamais ce coin sous un franc soleil ! Le Roque Cano, silhouette de sable cinq ans auparavant, joue désormais à cache-cache dans les nuages. Au loin, le Teide a la tête au dessus d’un chapeau de nuages s’arrêtant à la frontière de la caldeira.
Le spectacle reste superbe, évidemment. La frustration a disparu et le plaisir, franc, revient avec le soleil qui baigne l’embouchure de Vallehermoso. Je remonte la vallée vers le village, les jardins sont toujours aussi luxuriants, désirables. L’eau est rare, ici, mais elle est bien exploitée. Vallehermoso est toujours ce petit paradis et il m’avait bien manqué. Je ne tenterai pas de refaire cette randonnée lors de ce séjour… mais je ne m’interdis pas de le faire lors d’un prochain séjour ! Je finirai bien par le voir, ce Roque de Los Organos !