Le Nord-Est de la Gomera est un endroit assez désert, pastoral, solitaire et ma foi, pas si facile que ça d’accès puisque les routes ne pullulent pas et circonvoluent comme elles le peuvent au travers du relief tourmenté de l’île. Alojera fait office de petite capitale du coin, village niché au bord d’un barranco déchiqueté par les eaux, pays du miel de palmier qui est une des spécialités de l’île. Le ciel est bien bleu quand je démarre mon parcours, sous un soleil encore doux. Direction Tazo et Epina, deux hameaux voisins, pour une boucle autour de Alojera.
Le sentier descend le long du barranco, permettant de bien visualiser l’implantation du village autour de ce canal qui doit lâcher des flots déchaînés lors de fortes pluies. De nombreux réservoirs sont installés ici et là pour piéger un maximum de cette eau salvatrice. On laisse toutefois rapidement le village d’Alojera derrière nous pour s’engager sur une piste praticable en 4×4 sur les premières centaines de mètres. La piste longe quelques propriétés isolées, longeant en hauteur un barranco désertique et se dirigeant vers un autre petit vallon.
Ce dernier, largement plus verdoyant et entretenu, abrite quelques maisons sommaires, ainsi qu’autant de ruines qui n’aspirent qu’à devenir de petits paradis pastoraux, pour qui voudrait se lancer ! La piste devient sentier à cet endroit, pour remonter le barranco au milieu des palmiers et des terrasses de culture aménagées grâce à de grands murs de pierres. Ici et là, on découvre de nouveaux réservoirs, pour la plupart vides, tandis que d’antiques canalisations de pierre et de béton sillonnent le paysage, contournant ou entourant les reliefs.
Une petite grimpette supplémentaire m’emmène au hameau de Tazo qui a tout du paradis perdu. Quelques habitations de belle facture, un camp avec de nombreuses yourtes, des plantations un peu partout et la piste qui arrive jusque là. C’est mignon tout plein ici, pour se couper du monde tout en restant dans une communauté qu’on imagine sympathique et ouverte aux différences. Je rêve ? Peut-être. Je continue de remonter dans la pente, faisant sur les hauteurs de Tazo une pause déjeuner bienvenue !
Il reste encore un peu de grimpette jusqu’au hameau suivant de Epina et les nuages, les mêmes qu’hier mais un peu plus tardifs, commencent à se former et à partir à l’assaut des crêtes. L’ambiance change du tout au tout en arrivant à Epina, joli petit hameau situé en hauteur, en contrebas du col éponyme. De nombreuses maisons anciennes sont délabrées, il y a quelques propriétés clairement à l’abandon qui n’aspireraient peut-être qu’à un meilleur jour. En tout cas, cela fait envie et j’y réfléchis un peu, pas en me rasant, mais en redescendant vers Alojera.
De retour du côté de la maison, je cherche un coin de baignade. J’ai lu qu’il y avait une piscine naturelle à deux pas de l’ancienne pescante de Hermigua. Je n’y suis jamais allé et en approchant, je découvre que des panneaux déconseillent très fortement l’accès au site, où des éboulements peuvent arriver depuis les immenses falaises en surplomb. Il est vrai que c’est impressionnant et que l’ancienne route du pescante fait un peu peur, je suis content de l’arpenter à pieds ! Au bout : les anciens docks et bâtiments, l’océan un peu déchaîné, les anciennes piles soutenant les grues qui transbordaient les vivres des navires à l’île et réciproquement. Incroyable endroit. Incroyable baignade aussi. Comment ai-je pu passer à côté de cet endroit lors de mes deux précédents séjours !?