Wyoming – quatre journées à Yellowstone National Park – partie 2

Après une journée d’approche et une autre particulièrement belle et intense à Yellowstone, la seconde partie de ce séjour dans le plus vieux parc américain s’annonçait tout aussi bien ; avec un programme encore bien chargé tant la caldera regorge de merveilles géothermiques et autres paysages de haut vol.


Troisième journée – Mammoth Hot Springs, Grand Canyon et Norris Geyser Basin

Il fait encore beau ce matin-là, dans le Nevada, mais l’on sent que cela pourrait se gâter, se voiler, devenir un peu moins agréable dirons-nous. Je prends donc la route assez tôt puisqu’une tempête est en réalité annoncée pour la fin de journée ! C’est un peu une course contre la montre donc, mais en prenant le temps de se balader. Contradictoire ? Non, pas tant que ça.

La première étape est aussi la première sur la route depuis l’entrée nord : Mammoth Hot Springs. Les bâtiments de l’ancienne garnison militaire, bâtis fin XIXème, sont agréables à voir en sus d’être le QG du parc. Mais le clou du spectacle se situe un peu plus haut, les fameuses terrasses et sources chaudes qui ont formé l’incroyable spectacle géologique et géothermique des lieux.

Les noms sont comme ailleurs dans le parc évocateurs et représentatifs des 2 tonnes de calcite déposés chaque jour par les sources ! Liberty Cap tout en bas, Opal Terrace, Palette Spring ou encore les incroyables formes sculptées de Main et Minerva Terrace, à sec. C’est plus haut enfin qu’on en prend plein les yeux, avec la folle Canary Spring, très active et colorée, tandis que le haut plateau se pare de mille couleurs étincelantes ! Ne pas manquer, enfin, d’aller faire un tour sur l’Upper Terrace Loop Drive, qui a elle aussi quelques tours dans sa boucle. Mais douze mille photos valent mieux que quelques lignes…

Après tant de beauté, le souffle un peu court, il faut décider de la suite. Le ciel, qui s’était rapidement voilé, s’est finalement libéré et il est temps d’aller voir un autre grand lieu du parc de Yellowstone. Le Grand Canyon. Non, pas celui tout rouge, plus loin au sud. Le Grand Canyon de Yellowstone. Je me dis au début que l’appellation est sûrement un peu ambitieuse, pour ne pas dire présomptueuse.

J’arrive d’abord sur la South Rim Drive, la route aménagée sur les bords du canyon, où l’on peut soit rouler jusqu’au fameux Artist Point, soit randonner / marcher tout du long, depuis Uncle Tom’s Point. C’est ce que je fais en posant la voiture puis en filant à l’ouest voir le panorama sur les Upper Falls. Jusqu’ici, c’est joli, mais je ne suis pas encore stupéfait. Surtout que les escaliers menant à l’Upper Falls View est clos.

Mais c’est en randonnant jusqu’à Artist Point et un peu au delà que je vais me fracturer la rétine. Le Grand Canyon de Yellowstone est grand, tout d’abord, vraiment grand. Certes, son cousin le dépasse largement mais sa dimension reste phénoménale, surtout qu’elle est enrichie par une palette de couleurs volcaniques de toute beauté, coiffée par un beau liseré vert sapin qui tranche avec le bleu du ciel.

Chaque trouée dans les arbres, chaque promontoire, est le prétexte à un arrêt photo et contemplation, à la recherche de tel ou tel détail ou angle sublimant la zone. Je ne regrette pas une seule seconde d’avoir pris le temps de marcher sur ce rebord pour rejoindre le coin, assurément incroyable mais très peuplé de Artist Point.

Enfin, comme annoncé un peu au dessus, il ne faut pas hésiter à poursuivre un peu le chemin (il y a là une belle randonnée à faire soit dit en passant, une autre fois pour moi !) car le canyon change alors un peu de couleur, s’évase, laissant la place à plus de verdure encore et offrant des vues toujours différentes. Je n’aurai malheureusement pas le temps de pousser jusqu’au point sublime (c’est son nom) mais je n’ai pas eu l’impression d’être frustré avec déjà tout ça !

De l’autre côté, il y a la North Rim Drive menant au Canyon Village… et c’est à dire vrai un prétexte à de bonnes montées et descentes le long d’escaliers et chemins aménagés jusqu’en bas ou presque du canyon ! On découvre de superbes et incroyables vues sur les (Brink of) Lower Falls, au sommet de celles-ci ; puis un point de vue dégagé à Lookout Point, en haut comme en bas ; enfin une dernière escale s’impose à Inspiration Point. Vraiment, vraiment, quelle belle surprise que ce Grand Canyon à Yellowstone, je ne m’attendais tout simplement pas à ça.

Le temps a filé, la journée touche à sa fin et il faut se mettre doucement mais sûrement en route vers la sortie du parc. Le Norris Geyser Basin se trouve sur le chemin, escale bienvenue pour reprendre une belle dose de geysers, avec notamment le Steamboat Geyser (le plus haut du monde) et l’Echinus Geyser (acide, ne pas garer sa voiture dans le coin s’il est en éruption…) du côté du Back Basin ; sans oublier le Porcelain Basin avec ses belles étendues bleutées et mordorées. De toute beauté, même sous un ciel de plus en plus menaçant.

La journée est achevée, vraiment, cette fois. Je reprends la route vers le nord, vers Gardiner. Le flux de voiture est pour ainsi dire inexistant et le ciel est noir au possible devant moi. La neige se met à tomber dru au niveau de Golden Gate et Bunsen Peak. Voilà, la météo s’est gâtée pour de bon. Il reste à rentrer, toujours sous la neige, jusqu’à Emigrant… et attendre tranquillement que le grain passe jusqu’au matin.


Quatrième journée – Lamar Valley et Upper Geyser Basin

Il pleut. Il bruine. Les nuages d’altitude sont là, autrement dit, ils sont à hauteur des montagnes et collines environnantes. L’ambiance est à dire vrai assez largement écossaise et c’est pourtant la meilleure journée annoncée avant une série d’au moins trois jours tout à fait hivernaux. Le début de matinée est donc consacré à achever la réflexion entamée la veille.

Rester un jour de plus et faire une grande journée de route comme prévu ; ou bien partir un jour plus tôt et couper la route en deux en ayant un peu de temps dans un endroit que l’on a adoré : les Sawtooth Mountains. La décision est facile… car du soleil est annoncé de l’autre côté des montagnes ! Ce sera donc la dernière journée à Yellowstone.

Dans un vain espoir d’éclaircie ou de météo très locale, ou même de micro-climat, qui sait, je me dirige d’abord vers Lamar Valley, la porte nord-est du parc de Yellowstone. Des hordes de bisons et loups s’y retrouvent, comme dans la Hayden Valley. Il pleut, il vente, les bisons sont là, nombreux. Les antilopes aussi, graciles. Point de loups, vous vous en doutez, ils sont discrets.

Après une étape ratée au Museum of the National Park Ranger qui est tristement fermé, je prends la route du sud pour retrouver les nombreux bassins de geysers du second jour. Qui sait, le micro-climat est peut-être là. C’est à peu près vrai au niveau du Biscuit Basin où il ne pleut pas et où la température est un tout petit peu plus douce. Black Opal Pool, sublime Sapphire Pool, Coral ou encore Jewel Geyser sont là, pour une nouvelle dose de beauté minérale.

De l’autre côté de la route, un sentier s’enfonce dans la forêt. Il mène, en quelques dizaines de minutes, aux portes de l’Upper Geyser Basin. C’est le complément de la visite au Old Faithful, avec un énorme banquet de geysers divers et variés, tous plus impressionnants les uns que les autres. Dans l’ordre : Mirror Pool, Biscuit Basin Geyser, l’incroyable Artemisia Geyser, la célébrissime Morning Glory et puis plus près du vieux fidèle, un groupe de petits vieux… Mastiff, Grotto, Chromatic, Beauty, Economic (!), Vent, Spasmodic, Bulger, Castle ! C’est un festival, de bout en bout.

Je quitte les lieux. La journée n’est pas terminée mais la lumière est pour ainsi dire partie et une longue journée m’attend malgré tout le lendemain, même tronquée. Yellowstone m’a comblé et frustré à la fois. Comblé parce que j’y ai trouvé tout ce que j’attendais : des geysers, des phénomènes incroyables, de beaux paysages, des animaux très nombreux et proches, des lieux uniques au monde. J’y ai également vu ce que je déteste : le tourisme massif, brutal, décérébré.

Je fais partie du problème bien sûr, même si ce voyage s’effectue à deux. Il reste un satellite du tourisme de masse mais j’ai le sentiment malgré tout que je respecte les lieux que je traverse, pour y laisser le moins de traces possible. C’est un peu le credo du randonneur, ceci dit… Ce n’est pas celui des cars de touristes qui restent cinq minutes, courent partout, crient, marchent là où il ne faut pas, ne respectent pas grand chose. Ce n’est pas non plus le cas de celles et ceux s’arrêtant au milieu de la route, mettant en danger tant les animaux, stressés, que les autres usagers.

Yellowstone m’a également frustré, pour l’aspect randonnée justement. Il y a tant à voir sur le bord de la route que la randonnée semble presque accessoire. La faible dénivelée liée au fait que l’on soit dans une caldera n’aide pas non plus l’accro aux sommets et panoramas que je suis. Je reste pourtant persuadé qu’il me faudra revenir, encore hors saison, pour randonner uniquement. J’ai déjà vu tous les « hot spots » ; il me reste à me perdre dans la nature à la rencontre des animaux, au plus près d’eux mais en les respectant. C’est à ce moment-là que j’aurai vraiment vu et compris ce qu’est Yellowstone, je crois.


Les cartes de ces journées dans le parc de Yellowstone :