Taïwan. Taipei. Une autre Chine, accessible soudainement à la faveur d’un voyage professionnel étalé sur deux semaines. La fois précédente, c’est Shanghai qui m’avait tendu les bras de ses beaux platanes et m’avait séduit, convaincu d’y passer le weekend avant le retour bienvenu.
Cette fois-ci, j’ai longuement hésité entre Suzhou et ses jardins chinois tous classés à l’Unesco ou bien Taïwan, puisqu’une visite / audit chez un fournisseur m’y menait la semaine suivante. Comme il y a de très fortes chances que je reviennes à Suzhou, j’ai opté pour la seconde option et pris le parti de profiter de la capitale de Taïwan le temps d’un weekend.
Je suis arrivé très tard le vendredi soir, avec heureusement pour moi un service de transport limpide et pratique, rapide aussi, me menant plein centre. J’y loge, d’ailleurs, au Meander 1948 Hostel, une adresse que je ne saurais que trop vous conseiller pour son calme, son bon petit déjeuner et son personne adorabl au possible.
Au petit matin, je me lève malgré tout, pas découragé par une météo qui s’annonce maussade tout le weekend. Après tout, il n’est pas toujours possible de cumuler belle opportunité de voyage et météo idyllique. Lâcher prise, il faut que j’apprenne ça, paraît-il. Alors je m’y essaie.
Première étape : prendre de la hauteur ! Je me glisse dans le métro, facile, là-aussi évident et limpide… en direction d’Elephant Mountain, au départ de la station de métro de Xiangshan. De là, une courte mais raide ascension vous mène au sommet de l’une des collines qui ceinturent si délicatement Taipei.
Quelques roches très photogéniques, autant de promontoires et vous voilà avec l’une des plus belles vues de la capitale ! Surtout, l’endroit permet de se rendre compte du fait que Taipei est verte, entourée de vert et aussi assez « basse » d’un point de vue architectural. Beaucoup de plaisir en perspective.
Une fois redescendu, à rythme raisonnable pour tenter d’éponger tant bien que mal la petite suée prise à l’ascension (on a beau être randonneur, 30°C / 80% d’hygro de bon matin, ça picote), je file vers une des curiosités de la ville : le Village 44.
En remontant à travers rues, je découvre une partie de l’architecture de Taipei, avec de nombreux quartiers résidentiels, très calmes et vivants à la fois. Il n’y pas trop d’étages et la végétation est notable, ici et là, dans de nombreuses rues.
Le Village 44 apparaît soudain, avec ses anciens casernements bas. Le lieu a accueilli les troupes nationalistes lors du soulèvement de 1949. Pus d’un million de soldats et leurs familles durent être logés et les villages militaires essaimèrent dans l’île. Le Village 44 fut le premier d’entre eux et l’un des derniers existants, témoin de l’histoire pas si lointaine de l’île.
Le lieu accueille désormais des galeries d’artistes, des évènements et expositions, en bordure d’un grand stade. Le tout, avec quelques entrepôts semi-enterrés, se love sous le regard de Taipei 101, ma prochaine destination !
Taipei 101. Le fleuron de Taipei, l’un de ses plus grands symboles, cette unique grande tour qui dépasse toutes les autres et dominer la capitale. Le soleil a commencé à se voiler mais la tour n’a pas encore la tête dans les nuages, du haut de ses 508 mètres.
Après avoir traversé un mall commercial pharaonique, on atteint les ascenseurs qui fusent à plus de 1000 m/min vers le 89ème étage ! Décompression nécessaire en cours de route, avant de découvrir le panorama au 88ème, au 89ème ou bien encore au 91ème, à l’air libre.
C’est l’occasion d’observer la physionomie de la capitale, entourant complètement les fleuves qui la traversent, se lovant au pied des collines que l’on découvre aux quatre coins cardinaux. La mer semble lointaine, aussi, bien au contraire de la jungle. Quelle ville singulière ! A la fois asiatique et chinoise dans sa démesure et si… plate !
Avant de redescendre, il ne faut surtout pas manquer l’amortisseur harmonique. Cette grosse boule de 6 m de diamètre, pesant plus de 600 tonnes, sert à équilibrer la tour lors de vents forts ou de séismes… Impressionnant par la taille mais aussi pour la rareté qui consiste à pouvoir s’en approcher librement.
Le lieu de visite suivant est consacré au fondateur de la Chine moderne, Sun Yat-Sen. Il y a ici un grand musée que je ne visiterai pas, une grande statue du grand homme au pied de laquelle les gardes alternent leurs tours au gré d’une relève très élaborée, à chaque heure. J’arrive pile au bon moment… Folklore militaire et culte de la nation à plein nez. L’endroit a une ambiance étonnante, entre recueillement, révérence et spectacle.
Je file ensuite encore un peu plus au Nord du quartier de Xinyi, pour m’abriter du déluge qui crève soudain les nuages. Le Songshan Culture & Creative Park est le lieu idéal pour une petite pause café / douceur, pour flâner de boutique en galerie, au sein de cette ancienne fabrique de tabac et village industriel reconvertie en lieu culturel.
Je me rends ensuite dans le quartier de Da’an. Le grand parc forestier qui en occupe le coeur est impressionnant, très vaste et peuplé d’une foule incroyable de chasseurs de Pokémons ! Pokémon Go! est encore dans tous les coeurs ici et clairement, ça chasse fort malgré la pluie… J’aurais bien voulu voir le lieu sous le soleil, même si cette nuée de parapluies avait quelque chose de romantique, malgré les nés vissés aux smartphones.
Je continue ma looooongue marche à pieds à travers le quartier de Da’an pour rejoindre ZhongZheng. Les rues sont charmantes, peuplées de nombreux cafés et boutiques plutôt chic et adorables. Derrière la grisaille des murs, avec des intérieurs lumineux, il y a une certaine qualité de vie ou une nonchalance qui n’est pas sans rappeler certains centre ville européens. Agréable, avec le parapluie au dessus de la tête tandis que les gouttes s’obstinent à tomber.
Le but de ma pérégrination est en tout cas un autre monument majeur de Taipei : le mémorial Tchang Kaï-chek. Murs blanc et toit bleu trônant au centre d’une esplanade gigantesque, le bâtiment en impose, tout comme celui qu’il honore, le leader nationaliste et autoritaire responsable de la Terreur Blanche mais aussi de la naissance de la Taïwan moderne.
Au bout de ce chemin d’émancipation vis à vis de la Chine continentale, il y a la démocratie actuelle et le fait que cette place ait été renommée Liberty Square en 2007, comme un passage de témoin d’une époque vraiment pas si lointaine (TKC et son fils ont régné de 1947 à 1987). Du haut des 89 marches, on observe les deux grands pavillons et la porte absolument monumentale.
L’endroit est massif, vraiment. Il faut aussi revenir le soir, quand l’ensemble est illuminé mais que le mémorial se love quant à lui dans les ombres, ses murs blancs prenant un peu la lumière tandis que son toit fait la jonction entre la lumière du sol et l’obscurité du ciel.
Dernière étape pour en finir avec cette belle journée de découverte, sur le chemin du retour vers mon logement et avant d’aller boire quelques bières et attraper un bon repas dans une des multiples gargotes appétissantes (la nourriture taïwanaise est assez géniale !) : le Memorial Peace Park célébrant le soulèvement du 2-28 1947, le 28 février donc, l’un des marqueurs majeurs de l’histoire moderne et tourmentée de Taipei et de Taïwan.
Taipei est une ville à la fois moderne et ancienne, mais il est vrai que j’ai exploré lors de cette première journée sa facette la plus récente, surfant sur l’histoire du dernier siècle, voire des toutes dernières décennies. De l’indépendance à la répression et les années sous régime autoritaire, en allant vers l’explosion commerciale et industrielle des années 70 et ensuite la démocratie des 30 dernières années.
Demain est un autre jour, sûrement plus focalisé sur le passé de la ville et son eau, omniprésente. Taipei est en tout cas très séduisante, même sous un ciel plombé car ses habitants et son ambiance sont réellement apaisants et accueillants. Je n’aurais pas parié dessus et j’avoue avoir pris un petit coup au coeur et une sacré envie de revenir.