Cette fois-ci, la météo est annoncée superbe et surtout, dénuée de précipitations, ce qui rend tout à fait acceptable l’idée de s’engouffrer dans un canyon de plusieurs centaines de mètres de haut creusé par l’érosion ! La Gola di Gorropu est une des gorges les plus profondes d’Europe, en sus d’être une immense fracture dans un massif karstique qui n’a pas encore livré tous les secrets de son réseau hydrique mais cela, je ne le sais pas encore alors que je rejoins Genna Silana, un ancien bâtiment militaire situé sur la route de col faisant la jonction entre la région nord du golfe d’Orosei (Dorgali) et sud (Tortoli). Avant cela, je me suis tout de même arrêté au superbe mirador situé plus bas sur la route, là où se situe un petit restaurant. Pensez bien à vous rendre au belvédère situé à 100 mètres derrière le lieu !
Mais bref, Genna Silana, point d’arrêt pour de nombreux motards qui font la route. Pour ma part, je suis sur le petit parking « randonneurs ». C’est d’ici que je commencerai la randonnée pour ce qui est le chemin d’accès le plus intéressant à la gorge. L’autre accès à la Gola di Gorropu se trouve dans la vallée du riu Flumineddu, au même endroit que le départ pour Tiscali. Ce dernier sentier est plat et se fait essentiellement sur une piste carrossable tandis que ma randonnée est une descente incroyable à travers une chênaie magnifique. Le choix fut évident, aisé et alors que j’entame ma marche, je n’ai d’ores et déjà aucun regret. Il y a peu de monde sur ce parcours et les chênes sont en effectivement splendides, dominés par de superbes falaises.
La vue sur la vallée du Flumineddu et sur le village de Dorgali, au loin, s’élargit alors que les chênes disparaissent et laissent la place à une vue dégagée sur les blocs karstiques entourant la Gola di Gorropu, encore invisible. Le sentier et l’environnement sont nettement plus minéraux et alors que je suis pendant accompagné par un chat très communicatif et peu sauvage, à priori un habitué du coin puisqu’il porte un collier publicitaire pour la gorge, je m’ébahis devant les superbes falaises que le sentier longe désormais, avec un à-pic splendide au dessus de ma tête ! Quelques chênes réapparaissent, alors que le fond de la vallée devient peu à peu visible à travers les frondaisons centenaires.
L’entrée de la Gola di Gorropu est là, impressionnante, marquée par des roches gigantesques situées de part et d’autre. Ambiance Argonath, un peu. Le ticket d’entrée réglé, on a le droit à un petit briefing sécurité, histoire, géographie et géologie de la part d’un jeune sarde passionné par les lieux et par leur protection. Bâtons interdits à l’intérieur de la gorge, puisqu’il faudra s’aider des mains pour crapahuter et progresser jusqu’au fond de la gorge, avec différentes couleurs pour marquer la difficulté. Clairement, certains passages ne sont pas accessibles aux personnes en mauvaise forme physique, je m’en rendrai compte un peu après. Bref : écoutez bien et vous apprendrez par ailleurs que le réseau hydrique du massif du Supramonte s’étend sur plusieurs centaines de kilomètres et qu’il n’est toujours pas tout à fait compris !
Ce petit cours terminé, nous sommes autorisés à rentrer dans la gorge. La première partie, inondée par les intempéries des jours précédents, nécessite déjà d’arpenter une voie bis où les mains sont absolument nécessaires. C’est ludique à souhait, tout comme le fait de se faufiler dans un trou où le sac à dos passe à peine. Je comprends mieux maintenant pourquoi ils suggéraient de les laisser à l’entrée… mais bon, je me voyais mal sans mon appareil photo ici. Les falaises environnantes sont superbes, alors que la gorge est encore assez large et que l’on passe dans une quasi grotte où la végétation s’est installée durablement.
La partie suivante est largement plus étroite et les parois montent brutalement et verticalement au dessus de nous. L’ambiance est crétoise, avec les magnifiques gorges découvertes là-bas mais il n’y a ici pas de cadavres de chèvres en train de sécher… La toute dernière section est absolument monumentale et vous ne manquerez pas de chercher les silhouettes humaines dans les photos ci-dessous pour vous rendre compte des dimensions démentes de la Gola di Gorropu ! C’est toutefois « déjà » le bout de la gorge, même s’il est bien sûr possible d’aller encore plus loin mais c’est paraît-il d’un intérêt plus limité. Voici donc le bout de la route pour cette fois et je fais demi-tour pour aller déjeuner à l’entrée du site, les pieds dans l’eau qui jaillit fraîchement de la gorge. Ensuite, il faudra remonter… mais c’est une bien faible peine quand on considère la beauté de la descente et celle de la gorge. Vraiment, si vous le pouvez, faites la randonnée depuis Genna Silana.