Pour mon premier weekend « loin » de Paris après ces mois de confinement et de déplacements limités, j’ai eu envie de retrouver les Pyrénées-Orientales, un département dans lequel je me sens systématiquement bien et qui offre une variété assez incroyable d’environnements, culturels comme naturels.
Après une première journée très calme avec une belle balade de vélo sur les hauteurs de Céret en direction du col de Fontfrède (Albères dont il faudra un jour que je fasse l’ascension en rando soit dit en passant), je prends la direction du Conflent pour une randonnée longue, la première depuis le retour des Canaries tout début janvier !
Le parcours du jour débute au village d’Evol, classé fort justement parmi les plus beaux villages de France. Plus exactement, le début du sentier est à Thuir d’Evol, un petit hameau situé à quelques encablures du village et des ruines de son château. Me voici sur le Cami Ramader.
Il y a une petite vingtaine de kilomètres à parcourir, le tout montant d’environ 1300 mètres de façon très progressive et jamais difficile. C’est donc long et bon pour l’endurance, mais pas physiquement trop violent pour qui aime marcher et randonner. Bref : c’est bien pour une reprise !
La première section du sentier se fait dans une vallée schisteuse où d’anciens gisements et leurs rejets sont encore visibles ici ou là, tandis que les sentiers utilisent massivement le minerai tant pour le soutien que pour le revêtement. La luxuriance des lieux est assurée par la rivière d’Evol qui glougloute en contrebas, audible tout du long de cette première partie de l’ascension.
Après de petits ponts mignons, on rejoint les Corts d’Avall, avec une ferme perchée sur une sorte d’éperon et ici et là des ruines d’anciennes demeures de bergers. On ne s’y trompe d’ailleurs pas puisque le bruit des cloches se fait entendre. Un troupeau de vaches se promène sur le sentier, qu’elles concèdent à libérer placidement mais avec force meuglements.
La dernière vache se profile, je commence à lui parler et à la contourner tranquillement quand une masse blanchâtre attire mon regard au delà de sa croupe. Ah. Le taureau est aussi là ; impossible de voir par ailleurs s’il est entravé car il est tranquillement allongé au milieu – oui, au milieu, c’est confort – du chemin. Le contournement s’impose de lui-même, tant bien que mal, en contre-haut.
Le sentier progresse ensuite rapidement vers la Mouline et son refuge (ainsi que son ancien refuge). Je perds le sentier à ce moment-là et m’engage sur la piste forestière qui monte vers le col de Portus. En réalité, le sentier était un peu en amont du refuge, avec un panneau d’indication annonçant Evol… donc le retour. Misleading comme disent les anglais ; il fallait pourtant bien l’emprunter pour remonter à gauche à travers bois sur un sentier cairné que je trouverai en revanche à la descente.
En attendant, c’est un mélange entre piste forestière et raccourcis entre les différents lacets pour retrouver finalement sans trop d’encombre le col de Portus où quelques voitures de pêcheurs et comparses randonneurs sont garées. On pourrait presque croire que la destination est proche tandis qu’on emprunte la piste forestière qui grimpe jusqu’à une estive et que le plafond nuageux descend petit à petit vers nous ; à moins que ce ne soit l’inverse.
A l’estive, force est de constater que les 1300 mètres de D+ ne sont pas encore avalés et qu’il en reste jusqu’à la selle qui se détache en contrebas du Pic de la Créu. Le sentier se rétrécit peu à peu, se faufilant dans la végétation plus rase et accrocheuse qui monte vers l’objectif de la randonnée.
La selle est atteinte et avec elle un environnement lacustre, saturé d’eau au dessus de laquelle les nuages semblent stagner. Ambiance irréelle, avec les menus azalées ou rhododendrons sauvages en fleurs. Le Gorg Negre est juste à côté, après avoir traversé un petit bloc d’arbres. Pas un chat, pas un bruit, les nuages étouffent tout avant qu’un rapide éclaircissement ne dévoile les pentes encore enneigées juste en face.
Le déjeuner sera vite avalé car à presque 2100 mètres d’altitude et avec ce temps, ça caille un brin ! La descente se fait à bon rythme, il faut chauffer à nouveau la machine et rejoindre le Cami Ramader que l’on a quitté au niveau de la Mouline.
La température augmente doucement dans la vallée et le bruit des cloches se fait de nouveau entendre. Une sentinelle attend sur un sentier en corniche, l’air curieux, attentif. Pas méchant, mais il faut toujours se méfier des vaches. La traversée du troupeau est un peu moins hasardeuse mais là où il y avait un taureau, il y a désormais des vaches et leurs veaux.
Le contournement s’impose une nouvelle fois… avec une inconnue : où est donc passé le taureau ? Etait-il entravé ? Nous guettait-il quelque part ? Pas l’ombre d’une corne ou d’un muscle blanchâtre. Tant mieux ? Tant pis ? Allez, disons tant mieux ; il est temps de poursuivre et de retrouver Thuir d’Evol avec la mélodie de l’eau qui court en guise d’accompagnatrice.
Le Cami Ramader est donc une très belle randonnée et l’extension du parcours jusqu’à Gorg Negre – ou éventuellement jusqu’au Roc Negre si on est très motivé, voire jusqu’au Madrès ; peut-être en partant du col de Portus ? En tout cas, la région est de toute beauté et la proximité de la réserve de Nohèdes n’y est sûrement pas pour rien. Voilà de quoi se donner (encore) une nouvelle raison de revenir.