Jean-Pierre Andrevon, je l’ai découvert avec un Horizon de Cendres, livre choc sur une fin d’un monde, le nôtre. Point de fin du monde ici pour Sukran, petit roman de 300 pages qui nous plonge dans un futur très proche où la France s’est pris une dérouillée dramatique au Moyen-Orient, ayant voulu y faire croisade pour contrecarrer la création d’une fédération panislamique, autrement dit une Europe du Moyen-Orient. La quatrième de couv’ est d’ailleurs parfaitement explicite quant aux tenants et aboutissants du roman :
À Marseille, Roland Cacciari, militaire démobilisé après l’échec d’une piteuse croisade occidentale au Moyen-Orient, tente de survivre en jouant du guitarion à la terrasse des rapid-food. Il se fait remarquer par Éric Legueldre, richissime industriel proche de l’ultradroite qui lui propose de travailler comme veilleur de nuit au sein de son entreprise spécialisée dans les nouvelles technologies. Roland vient, sans le savoir, de mettre le doigt dans un engrenage qui pourrait bien lui être fatal. Car son employeur a organisé un ignoble trafic d’êtres humains, concernant au premier chef les Maghrébins composant désormais 50% de la population marseillaise. Šukran est une fable de science-fiction qui prend des allures de thriller. Écrit il y a vingt ans, ce magnifique roman, qui a obtenu le Grand Prix de la Science-Fiction française, reste d’une brûlante actualité.
Cette présentation, très série B, camoufle habilement tout l’enrobage géopolitique que l’auteur a parfaitement intégré à son roman et à son enchaînement de péripéties. Sous le couvert d’une écriture incisive, à la première personne et suivant donc ce « démo » qu’est Roland Cacciari, Andrevon nous assène la description d’un futur hautement réaliste et surtout parfaitement cohérent avec les évolutions actuelles de la géopolitique moyen-orientale. L’ensemble est vivant, prenant et surtout effrayant de par son réalisme.
Et même si les personnages sont parfois stéréotypés, si les situations semblent trop bien se suivre et s’agencer, le tableau ainsi dressé n’en reste pas moins terriblement prenant et addictif même si la fin peut quelque peu surprendre par son soupçon d’humanité là où d’ordinaire Andrevon a plutôt tendance à vomir l’humanité et à la détruire ! Pas désagréable pour autant…
Parmi tout ces éléments se glissent aussi quelques morceaux de cyborg, de domotique, de savants-fous, de critique politique, bref un peu de tout ! Une tambouille plutôt jouissive et plaisante à lire que je vous suggère de dévorer au plus vite.