Cette randonnée dans le Queyras a une place assez particulière dans mon coeur de randonneur, pour plusieurs raisons ! Déjà, parce que j’ai franchi un passage que je n’aurais jamais du franchir et où j’aurais pu y passer si jamais je glissais ne serait-ce que de quelques centimètres. Ensuite parce que les paysages étaient vraiment, mais alors vraiment à couper le souffle. Enfin, parce que c’était la première fois que je gravissais deux sommets à plus de 3000 mètres sur la même journée (et ce n’était pas prévu à l’origine… mais la tentation, les paysages, etc.). Bref : elle est vraiment incroyable et si vous évitez le passage mentionné au début de ce texte, vous passerez une journée incroyable dans le Queyras, à la conquête du Pic de Foréant et du Pain de Sucre.
Tout commence en contrebas du Col Agnel, frontière entre la France et l’Italie. Quelques parkings sont aménagés en bord de route, du plus petit au plus grand, avec un grand refuge attenant, le parcours de la randonnée empruntant un tronçon du GR faisant le tour du Queyras. Pour la première montée, on n’emprunte en tout cas pas ledit GR mais on part à l’assaut des pentes assez abruptes menant au col de l’Eychassier après avoir fait rapidement face au Pain de Sucre. On traverse et on longe à cette occasion un troupeau mêlant brebis et chèvres et gardé par plusieurs chiens clairement pas inquiétés par notre présence. Le col est en tout cas rapidement atteint, offrant une vue d’ores et déjà magnifique sur les alentours du Pic de Foréant.
C’est à partir de ce moment qu’il faut être attentif car le tronçon allant du col de l’Eychassier au sommet du Pic de Foréant est par endroits particulièrement exposé, avec un passage en crête très étroit ! La montée est d’abord soutenue mais globalement simple, avant de rejoindre justement ce tronçon très minéral où le sentier se fraie tant bien que mal un chemin, contournant ici et là les blocs de roches qui s’effritent facilement sous la main. Au niveau d’un petit ressaut, le sentier part sur la droite des rochers, se montrant très étroit à cet endroit. Il est même légèrement effondré et fait comme une sorte de petit entonnoir. C’est là que je suis passé et où j’aurais du en réalité rebrousser chemin pour prendre une sorte de variante qui grimpe dans les rochers et que j’ai ratée. Bref : ne la ratez pas et ne passez pas par cet entonnoir glissant. La chute, c’est la mort, à cet endroit (la zone est bien visible sur la trace GPS, puisque j’ai fait demi-tour pour trouver un chemin plus praticable pour Aurélia).
Bonne nouvelle toutefois, une fois ce passage particulièrement délicat passé, le sentier reprend une forme montagnarde nettement plus praticable jusqu’à la petite selle qui marque l’ascension finale du Pic de Foréant, très minérale et donnant sur un sommet impressionnant, avec un à-pic splendide d’où l’on domine tous les lacs et le vallon en contrebas. Pain de Sucre, Monte Viso et lacs divers semblent à portée de main, quel belvédère remarquable que ce Pic de Foréant !
La descente nous mène ensuite doucement mais sûrement vers les lacs en contrebas. On retrouve un des sentiers venant du col de l’Eychassier et quelques familles en cours de pique-nique au niveau de l’adorable petit lac tout rond attenant au lac de l’Eychassier et dominé par le Pic de Foréant. La descente continue jusqu’à un autre lac fleuri que l’on dépasse également pour prendre un ancien sentier très peu dessiné et à dire vrai parfois totalement effacé… La direction reste simple : il faut rejoindre le GR via le lit d’un cours d’eau asséché, qui permet d’ailleurs de garder un cap à peu près correct pendant la descente, le tout sous les parois immenses et fascinantes de la Crête de la Taillante !
Le GR rejoint, la descente vers le lac Egorgéou est aisée et rapide. Le lac, immense, se niche dans un vallon d’altitude recouvert d’une végétation marécageuse verdoyante. La zone est heureusement interdite d’accès afin d’être protégée des pieds des randonneurs qui restent donc cantonnés du côté ouest du lac, profitant de la Taillante qui domine ce dernier. Pour la pause déjeuner, j’ai continué ma route pour quelques centaines de mètres supplémentaires, jusqu’à quelques petits lacs mineurs nichés juste au dessous de l’Egorgéou ! Les lacs Baricle, dont certains abords sont également protégés, sont de petits miracles alpins où il fait bon se baigner dans le plus simple appareil avant de prendre une pause déjeuner bien méritée.
Il est désormais temps de rebrousser chemin en arpentant le GR jusqu’au Col Vieux. En chemin, le Pain de Sucre domine la zone, tout comme la Taillante que l’on retrouve d’un peu plus près au niveau du Lac Foréant qui lui baigne les flancs. Quel bout de chemin remarquable, même s’il faut encore monter, la descente du Pic de Foréant jusqu’au lac Egorgéou m’ayant mené plus bas que mon point de départ ! La randonnée est un peu demandeuse mais les paysages sont si beaux que tous les efforts sont récompensés. C’est d’ailleurs à ce moment-là et en voyant la lumière se dorer légèrement que j’ai décidé de faire l’ascension du Pain de Sucre en sus… je ne pouvais me résoudre à quitter les lieux.
Juste avant le Col Vieux et au moment d’attaquer l’ascension du Pain de Sucre, un regard en arrière permet de prendre encore une belle dose de la beauté de la Crête de la Taillante dominant le lac Foréant. Le regard en avant montre quant à lui un sentier purement minéral qui va aller croissant en difficulté et en pente ! Le sentier, globalement lisible et tracé, n’en reste pas moins ardu. Il est étroit et parsemé de bouts de roches, tandis que ses abords sont des éboulis glissants de bonne taille ! Parfait pour surfer sur un pierrier, donc autant éviter. Reste la partie finale de l’ascension qui se fait sur de grandes plaques de roches, le sentier ayant disparu pour de bon.
Le sommet, enfin. Deux cimes s’enchaînent, offrant des vues légèrement différentes. Il ne faut pas hésiter à longer la crête sommitale pour rejoindre le dernier point du sommet, qui ouvre complètement le panorama du côté italien. Monte Viso, aiguille d’Asti, Crête de la Taillante, Pic de Foréant et tant d’autres, ils sont tous là. De l’autre côté, ce sont tous les 3000 du Queyras sud qui sont visibles tandis qu’à l’ouest on aperçoit quelques géants bien connus ainsi que le massif des Ecrins. Quel mirador, quel belvédère, incroyable ! Je reviendrai.
La descente jusqu’au Col Vieux puis jusqu’au parking est une formalité que j’avale en trottinant. Le Pain de Sucre continue de prendre le soleil. Je crois que j’aimerais bien voir le coucher de soleil de là-haut. Ou le lever. Ou les deux.