Corse – variante alpine du GR20 dans les Aiguilles de Bavella

Il faut parfois attendre la fin d’un voyage pour enfin pouvoir réaliser ce qui était prévu, rêvé, planifié, envisagé, dîtes ça comme vous le voulez mais vous m’aurez je pense compris. Je fais partie des gens qui prévoient et planifient trop, y compris pour ce qui est de ce que j’aimerais faire pendant mes vacances. Je repère certaines randonnées, je fantasme certains sommets, certaines ascensions et les paysages qui vont avec.

Ne pas avoir pu profiter au maximum, pour ne pas dire quasiment pas du tout du centre de la Corse était une sacrée frustration… et la seconde semaine a été à peine mieux. Heureusement, il y a eu cette dernière journée de beau temps sur l’Alta Rocca et sur le massif incroyables des Aiguilles de Bavella. Il y aura donc eu au moins une randonnée majeure au programme de ce voyage !

Me voilà donc de retour au col de Bavella, accompagné cette fois. La météo est parfaite, quelques petits moutons sont visibles au loin, sur la côte est. Les Aiguilles de Bavella sont complètement dénudées, superbes, tandis que Notre-Dame-des-Neiges veille, au soleil. Le GR20 et sa variante alpine n’attendent plus que d’être arpentés.

On fait d’abord quelques tours et détours pour éviter les vaches qui prennent également le soleil et semblent encore moins bien réveillées que nous. Le GR20 se retrouve facilement, balisage parfait oblige. Arrive enfin une petite pancarte et un nouveau balisage en jaune. « Variante Alpine » que ça dit. Et ça a l’air de monter sec de chez sec.

Cela se confirme très rapidement et la prise de dénivelée devient quasiment pénible, avec un parcours très rocheux et rocailleux, glissant par endroits et doté de quelques marches casse-pattes. Il fait encore frais mais après quelques minutes, le tshirt est de retour, le softshell est dans le sac et il n’en ressortira plus avant le soir.

Un couloir herbeux extrêmement ardu semble clore la première phase de l’ascension. Les premières roches des Aiguilles de Bavella sont désormais autour de nous, avec leur profil déchiqueté, érodé, abrasif. Les arbres s’accrochent partout où ils le peuvent. La route du col de Bavella semble désormais si lointaine quand on arrive au niveau de l’ouverture donnant sur le cirque alpin.

Le Col de l’Oiseau, c’est son nom, offre un passage à travers la muraille. Le paysage des Aiguilles de Bavella, que l’on observe désormais de beaucoup plus près, est à couper le souffle. On pourrait presque s’arrêter là mais ce serait rater beaucoup d’autres points de vue incroyables. Je m’éloigne un tout petit peu sur la droite, hors sentier, à travers les roches que j’escalade, cherchant un point de vue dégagé sur la Punta di l’Acellu, ou Tour I ; ainsi que sa première voisine.

De retour sur le sentier, j’entame un premier bout de descente qui m’amène au pied de la première aiguille, avant de filer en remontant vers la Punta di l’Ariettu, ou Tour II. Quelques nuages semblent vouloir venir s’accrocher au sud du massif, mais rien d’inquiétant. On est loin des nuées du jour précédent, qui avaient fini par masquer les aiguilles de Bavella.

Le sentier finit par passer au pied de la Tour II pour rejoindre une grande dalle rocheuse surplombant tout le cirque et dégageant de belles vues vers l’est. Il faut descendre cette dalle via des chaînes assez impressionnantes mais surtout très ludiques ! Les roches offrent un bon niveau d’accroche et les chaînes sont bien ancrées, ce qui rend la chose aisée (mais qui n’empêche pas de rester concentré).

Après cette nouvelle phase de descente, il faut bien remonter vers le col que l’on devine un peu plus haut, entre la Tour II et la Tour III (qui se nomme par ailleurs Punta di a Vacca). La montée est une fois de plus raide à souhait, tout le massif est parfaitement corse de ce point de vue… montées et descentes sur l’île sont abruptes et rocailleuses !

La brèche offre une jolie vue sur l’ouest de l’Alta Rocca mais la montée n’est pas terminée, alors autant aller chercher des points de vue encore plus hauts ! La suite de la montée permet de d’admirer la Tour II, tandis que la première semble jouer à cache-cache derrière elle. Elles disparaissent toutes deux à un détour du sentier autour de la Punta di a Vacca, situé à mi-chemin de la Tour II et… de la Tour IV. Logique.

On peut alors soit continuer son chemin, soit faire un petit détour mêlant randonnée et escalade légère. Je laisse les bâtons à mi-ascension afin de me libérer les mains qui seront bien sollicitées pour atteindre le double sommet de la Punta di a Vacca. Le second sommet se mérite un peu et doit s’aborder avec humilité et concentration. Toute glissade serait mortelle, tout simplement. Mais la récompense est à la hauteur de l’effort.

Il reste à terminer l’ascension jusqu’au pied la Tour IV, la Punta di u Pargulu. La Bocca di u Pargulu, le col qui marque la fin de la dénivelée positive principale de cette randonnée, est un coin parfait pour déjeuner et savourer la vue sur les deux côtés du massif et sur les aiguilles de Bavella que l’on vient de traverser.

Après cette juste pause, le sentier passe côté ouest, à l’ombre des tours IV, V, VI et VII ; Longa, Alta et Iolla. Le court passage de légère descente se mue rapidement en une descente raide à travers bois, avec de nombreuses marches et quelques escarpements rocheux permettant de sortir la tête des bois et profiter du paysage. La variante alpine du GR20 se termine, on retrouve ensuite le sentier normal.

Le GR20 contourne largement les aiguilles de Bavella, contraint par la crête du Pargulu, acérée et abrupte ; qui tranche le paysage tel un aileron de requin. Le sentier est donc long, tantôt en sous-bois, tantôt franchement ensoleillé. On aperçoit les aiguilles, ici et là. On voit aussi le sud du massif de l’Alta Rocca. Pas grand monde, des odeurs de maquis et d’aiguilles de pin, la balade est longue mais douce.

Le sentier longe ensuite les pentes plus abruptes à proximité des premières aiguilles, les frondaisons se trouant de temps en temps pour découvrir les tours désormais couvertes de nuages plus ou moins menaçants ; comme le prévoyait la météo. Pour une fois qu’elle nous laisse le temps de bien faire les choses !

Un dernier petit bout d’ascension (ahhhhh, il était là le dernier bout de D+ !) permet de remonter à travers roches vers le col de Bavella. Quelques rayons de soleil trouent encore les nuées pour offrir de beaux contrastes sur les tours et forêts environnantes. Les jambes commencent à fatiguer un peu mais le col est finalement là. Plus qu’à rejoindre l’un des bars du coin pour profiter une dernière fois du massif et siffloter gaiment, heureux d’avoir enfin pu faire une très grande et belle randonnée !

La carte de cette randonnée :