Essai – Ford Focus ST

La fin d’année passée très chargée et toute l’aventure covid-19 ont failli avoir raison de mon essai de la nouvelle génération de Ford Focus ST (et de Ford Focus tout court). Enfin, nouvelle… plus si nouvelle d’ailleurs puisque les premiers essais pressent doivent avoir un an désormais ! Mais il n’est jamais trop tard pour essayer une auto, qui plus est l’une des toutes dernières sportives du segment.

Quelques semaines avant son départ définitif du parc presse, j’ai donc pu essayer la Focus ST dans son crû 2019, désormais forte de 280ch via le 2.3L EcoBoost en provenance de l’ancienne RS et de feu la Mustang à petit moteur. La boîte reste manuelle et à 6 rapports pour mon essai tandis que l’auto est ici livrée avec le Pack Performance à 1200€ qui amène notamment une suspension adaptative, le mode Track et le Rev Matching (bref, un must have).

Tout cela ne dit bien sûr pas le travail réalisé sur le châssis et les trains roulants de la Ford Focus ST mais commençons d’abord par faire le tour du propriétaire pour réaliser que cette nouvelle Focus ressemble à la fois fortement à sa prédécesseure tout en empruntant des éléments de style à la récente Fiesta. Le volume général étant quant à lui très similaire à tout ce qui se fait sur le segment, normalisation oblige.

Les codes « ST » sont les mêmes, avec le petit blason ici et là, le désormais habituel logo Ford Performance, un joli set de roues et un bel équilibre contrastant entre le Orange Fury de la robe et les éléments noirs de la face avant et des flancs. A l’arrière, une double sortie d’échappement annonce la couleur, tout comme le petit becquet. Rien de trop démonstratif mais une sportivité évidente, c’est une « ST », pas une « RS ».

En somme, cette nouvelle Ford Focus ne fait pas dans la révolution mais dans une évolution bien logique, moderne et cohérente du reste de la gamme Ford. Après tout, au même titre que l’ancienne Fiesta, l’ancienne Focus était une réussite et ne nécessitait pas une refonte intégrale de ses principes.

A l’intérieur, c’est en revanche une belle refonte qui nous attend, complètement dans l’esprit de ce que j’ai pu voir dans la dernière Fiesta ou Fiesta ST. Remontons un peu le temps en rouvrant un vieil article de ce blog, avec l’essai à sa sortie de la Focus… Profusion de boutons, écran microscopique, mais surtout profusion de boutons. Bon, les facelifts étaient passés par là et sur la Focus RS, c’était déjà bien mieux mais cela devenait difficile de masquer l’âge de l’auto !

La dernière Ford Focus ST reconduit donc l’excellent petit écran couplé à SYNC3 de la Fiesta ainsi que ses commandes, avec la sélection de modes de conduite au volant et à dire vrai encore un peu trop de boutons sur ledit volant à mon goût. Le diamètre de la jante est agréable mais le volant me semble toujours assez grand chez Ford. Pas gênant, juste une impression.

Les plastiques sont globalement honnêtes, tout comme les assemblages, surtout pour une auto facturée 34k€ en base. C’est sérieux, plutôt sobre et bien fait. Surtout, l’équipement est pléthorique, une habitude chez Ford avec quelques options sympathiques en sus comme un affichage tête haute ou le régulateur adaptatif bien fait avec lecture et adaptation automatique aux panneaux.

Je ne vais pas m’éterniser sur les différents systèmes, puisque j’ai tendance à mettre Apple CarPlay directement et ne plus toucher à rien ensuite… La dernière remarque concerne en revanche les compteurs et le mode d’affichage qui font un peu datés désormais. Je suis curieux de voir les compteurs 100% numériques disponibles sur les nouveaux véhicules du constructeur.

Dernier point, « ST » : hormis le logo sur le volant et ailleurs, il y a bien peu d’éléments sportifs à signaler, l’essentiel étant les excellents baquets Recaro choisis par Ford. Le maintien est excellent et surtout, ils sont fait pour des gabarits plus variés que mes souvenirs de la précédente génération où les poignées d’amour n’étaient clairement pas les bienvenues ! La position de conduite est en tout cas idéale.

La nouvelle Ford Focus ST est donc une évolution tout à fait logique de l’ancienne génération de Focus, alignant son apparence extérieure sur les nouveaux canons de la marque et se mettant bien logiquement à jour à l’intérieur. Mais quid du « ST », quid de la performance et notamment de l’équilibre de l’auto et du travail de son train avant, très généralement perfectible et maltraité par le moteur sur la version antérieure.

Le choix du bloc 2.3L dans une version plus sage n’est pas anodin et garantit à la Focus ST une puissance certes assez « sage » de 280 ch (en progrès face aux 250 de la MkIII) mais aussi et surtout un couple de 420 Nm ! Les relances et accélérations sont donc plutôt velues et s’extraire d’une courbe n’est jamais un problème avec ce moulin qui crachote à l’échappement dès le mode Sport enclenché.

La bande son est agréable et comme souvent maintenant réinjectée dans l’habitacle mais ce n’est pas trop gênant ou caricatural comme chez certains. Il y a quand même quelque chose de très linéaire dans ce moteur, bien moins explosif qu’un 5 pattes ou même que sa version RS ; un tout petit plus de caractère aurait été le bienvenu, en sus du côté très rempli.

Le constat est le même du côté de la boîte de vitesse, la commande n’étant pas un modèle de précision. Elle n’est pas mauvaise, mais j’ai connu mieux avec quelques verrouillages accrocheurs. Le guidage est pas mal, mais les débattements un peu longs. Rien de dramatique, il reste juste à peaufiner un brin pour la rapprocher d’une référence comme la Civic Type R.

La direction mérite peu ou prou les mêmes remarques car se durcissant un peu trop artificiellement à mon goût en mode Sport. Si encore il y avait un excellent ressenti du train avant mais ce n’est pas tout à fait le cas, elle filtre un peu trop. La démultiplication et la vivacité sont là mais il manque ce petit peu de feeling qui met complètement en confiance.

C’est dommage car cette Ford Focus ST a gommé le principal défaut de l’ancienne génération : des remontées de couple quasi permanentes à l’avant et un arrière qui aimait décrocher. Le train avant, bien aidé par les Mich’ Pilot Sport 4S, se jette avec gourmandise dans les courbes et y reste. Le différentiel qui équipe l’auto l’aide à tenir le cap dans les courbes moyennes et l’arrache des courbes resserrées avec efficacité. On peut désormais ressouder la pédale de droite assez tôt en ressentant bien ce qu’il se passe.

Le train arrière se veut également mobile mais il est progressif, très naturel, me faisant un peu penser à la Megane R.S. MkIII. Ce n’est pas aussi joueur qu’une Fiesta ST ceci dit ; mais ce n’est pas un mal en considérant les 1500 et quelques kilogrammes de l’auto. Cette masse ne se fait pas trop ressentir si ce n’est sur quelques gros freinages en appui – freinage qui endure d’ailleurs sans problème les « runs » avec ce qu’il faut de mordant et ressenti sans être trop pointu.

En bref, cette nouvelle Ford Focus ST est bien plus amusante à emmener que l’ancienne version et n’a pas besoin de 4 roues directrices pour être agile et vivante. S’il fallait une preuve supplémentaire des progrès constants de la division Ford Performance après deux générations de Fiesta ST à croquer, la voici.

Il reste en revanche à mon sens à travailler sur l’amortissement, que je trouve déjà un peu trop raide en Normal, avec de la restitution faisant que ça tressaute sur routes bosselées, il n’y a pas vraiment de mode « Confort », en somme ; vraiment dommage sur une ST.

Cette raideur globale se retrouve en Sport même si c’est finalement le meilleur mode, tandis que le mode Track doit être réservé aux billards. J’ai l’impression que Ford a un peu perdu le bon équilibre trouvé sur les dernières Focus RS. La faute à cette masse un peu trop élevée ?

530 kilomètres plus tard (avec un 10.8 L/100 de moyenne – un rien gourmand), la conclusion de l’essai de la nouvelle Ford Focus ST reste très positive. Elle n’est pas encore parfaite et ne peut prétendre à la première marche du podium mais elle s’en rapproche encore.

Les grands défauts ont été corrigés, il reste encore du travail de compromis et de mise au point mais la base est là, agréable, fun à conduire et gourmande de virages. Il n’en reste plus beaucoup des comme ça, au même titre que la Fiesta ST est bien seule sur son segment… Il faudra voir où se place la future Golf GTI, car du côté des françaises, il n’y aura sûrement plus personne.

Et allez, à défaut d’une Focus RS MkIV que nous ne verrons probablement jamais, une version un peu allégée et radicalisée à mi-vie en sus de celle-ci permettrait d’offrir un joli couple d’autos dans la gamme Ford : une Focus ST capable de tout faire avec les menues corrections listées ci-dessus et une auto encore plus « focus » pour ceux voulant forcer encore un peu plus le trait.