Essai – Mercedes-AMG A 35 4MATIC

Voici deux ans que je n’avais pas eu l’opportunité de me mettre au volant d’une voiture étoilée. Depuis, la gamme a évolué, s’est enrichie, a accueilli de nouveaux SUV, a vu apparaître un nouvelle Classe G, etc. Surtout, Mercedes-Benz a renouvelé celle qui l’a réinventé il y a désormais sept ans, en 2012 : la Classe A.

Mercedes, marque un peu vieillotte, entamait alors une mue radicale, faisant de la petite A bien plus qu’une sorte de monospace incapable de passer le moose test, à savoir un best-seller moderne, dynamique, séduisant et indubitablement premium.

L’ensemble de la gamme en a pris de la graine et j’imagine que l’âge moyen du client Mercedes en a profité pour rajeunir, comme c’était prévu. Je serais curieux d’avoir les chiffres. En tout cas, cela doit être « bon » car la marque persiste et signe avec une belle évolution de la « A » en 2018 pour sa quatrième mouture.

Qui dit Mercedes-Benz dit aussi Mercedes-AMG et la division sportive de la marque est plutôt prolifique elle-aussi, ayant donné naissance aux « petites » 43 et 53, en sus des sempiternelles et affriolantes AMG 63. Las, ils ne savent pas s’arrêter, ces allemands, puisqu’ils se sont décidés à combler le gouffre entre une A 250 et une A 45 AMG.

Voici donc un nouveau segment étrenné par la petite nouvelle : Mercedes-AMG A 35 4MATIC. Les noms s’allongent mais le patronyme est évident. AMG. Ok, on attend de la férocité et de la sportivité. 35. Moins que 45… sûrement plus de compromis ? 4MATIC. On avait l’habitude car il ne reste si je ne dis pas de bêtises plus que la « vieillissante » Classe C à être 100% propulsion chez AMG si l’on excepte l’exclusive AMG GT.

Deux ans après, me voici au volant de cette petite bombinette grise qui devait à l’origine être jaune, pour un essai qui a tout d’un double coup de fusil. Enthousiasmant ? Voyons voir.

A l’extérieur, cette nouvelle Classe A et à fortiori la A 35 ne fait pas de grande révolution par rapport à la génération précédente. Il faut dire que celle-ci avait tapé tellement fort qu’il n’était pas vraiment nécessaire de remettre un énorme coup de crayon supplémentaire. Les designers ont donc raffiné leur design, reprenant des éléments de style d’autres véhicules sortis entretemps.

La Classe A avait un peu vieilli ces dernières années, malgré le facelift, prenant presque un petit air rondouillard. Pour corriger ça, le capot s’est affiné et élargi, abaissé et le regard a mué, se faisant plus agressif. La version A 35 se dote qui plus est de grands étriers fixes à l’avant et de grandes roues multi-bâtons en 19″.

Mon modèle d’essai, arborant un joli (et très discret) gris embarquait également le pack « noir », d’où la couleur des roues mais aussi celles des ailettes d’évents frontaux, de la lame du splitter, des rétroviseurs et du bas de jupe à l’arrière. Jupe par ailleurs percée par deux petites trompettes sympathiques et surmontée d’un aileron bien intégré, surligné de noir laqué également.

En bref : la Classe A évolue, grandit, raffine son style et fait tout sauf révolutionner son positionnement. Elle a seulement l’air plus grande qu’avant, montant encore et encore en taille et gamme. Décevant ? Non, simplement logique.

Quant à cette version A 35, elle a juste ce qu’il faut de signes extérieurs de sportivité et d’agressivité, sans trop en faire. La version jaune soleil avec ses flaps de bouclier et son aileron pelle à tarte aurait été de trop, tout bien réfléchi.

La révolution existe, ceci dit. Elle est à l’intérieur. La nouvelle Classe A époustoufle par son niveau de technologie embarquée, autant que pour sa finition et ses assemblages. Il faudrait une réelle revue de détails pour parler de toutes les options et fonctions disponibles, je vais tenter d’être le plus concis mais complet possible !

Parlons d’abord matières et assemblages. La A 35 présente d’évidents mais discrets signes sportifs, à commencer par ces superbes baquets revêtus d’un beau cuir marron perforé. Les sièges avant chauffent ou ventilent, au choix et se règlent de façon bien précise grâce aux commandes rapportées dans les portières, comme sur une « grande » Mercedes.

Les intérieurs de porte sont par ailleurs bien qualitatifs même si pour ma part, j’ai trouvé la poignée de portière un rien branlante et ne donnant pas du tout une sensation de robustesse, alors même que la portière est très lourde et même difficile à claquer / fermer. Peut mieux faire de ce côté.

Au centre, l’AMG A 35 souffle également le chaud et le froid, selon que l’on regarde plus haut ou plus bas. Tout au centre, il y a le nouveau poste de contrôle, avec son repose poignet et son énorme pavé tactile à retour haptique. Un régal à manipuler, pour le conducteur ou pour le passager pour peu que l’on daigne donc reposer son bras sur ce support de cuir revêtu.

Un grand tiroir coulissant libère les espaces de charge et de rangement, bien conçus et avec une prise USB (pardon, USB-C ! ) pour le smartphone. Au dessus, quelques belles touches de piano, des buses d’aération qui n’évoluent que peu. On est en terrain plutôt connu par ici. En revanche, l’habillage du tunnel central, en plastique noir très laid, choque, tout comme les ajustements. Autant sous le volant, je m’en fous un peu, autant là, sur un véhicule premium, c’est déplacé.

Heureusement, le clou du spectacle est réussi et se situer à hauteur de regard. Au mieux, il agira comme un aimant et vous évitera de regarder les bas-fonds de l’auto car vraiment, il y a là matière à s’émerveiller sur un véhicule de ce « petit » segment. Après tout, la Classe A, même en A 35, reste l’entrée de gamme de Mercedes-Benz mais aussi celle de Mercedes-AMG !

C’est très simple en réalité : les technologies inventées sur la Classe S et la Classe E sont directement descendues tout en « bas » de la gamme qui en profite donc pour prendre une grande dose de premium technologique. Double écran gigantesque, petits pads tactiles et cliquables commandant au pouce droit l’écran droit et de même pour la gauche, on a tout sous les yeux et il ne manque rien si ce n’est le sélecteur de mode de conduite, présent quant à lui toujours au centre de l’auto.

Le volant AMG est splendide, revêtu d’un cuir perforé moelleux et prolongé de deux petites palettes ayant le bon goût de ne pas être en plastique noir. Les chromes abondent chez Mercedes et cette A 35 ne faillit pas à la « règle ». Les fans de Audi détesteront sûrement, je trouve pour ma part qu’il y a un léger côté clinquant mais qui me choque bien moins qu’avant. Sûrement la robe marron et la belle planche de bord perforée elle aussi côté passager.

Autre « règle » chez Mercedes : le déclenchement du frein de parking à gauche du volant ! Le bouton est plus petit, bien intégré et fait évoluer la marque dans le bon sens de l’histoire. Fini le gros bouton « P » tout moche, voire la pédale spéciale typée utilitaire. Les comodos ont eux-aussi évolué, avec un style et une ergonomie revues. Du raffinement et de l’attention partout, c’est ce qui m’a le plus impressionné en fait.

Et l’interface de ces deux beaux écrans dans tout ça ? Je dois rejoindre nombre des essayeurs de ces interfaces nouveau jus de la marque à l’étoile… C’est splendide à gauche, avec des affichages selon les modes qui vous raviront les pupilles. On navigue aisément au pouce de ce côté-ci de l’écran, même si le passage en mode plein écran / détaillé est loin d’être aussi évident que chez Audi.

C’est en revanche plus compliqué à droite même si là encore c’est très très beau ! L’interface Mercedes-Benz / AMG a toujours été complète mais complexe, avec une navigation entre menus pas si évidente. CarPlay est très bien intégré en revanche et il est possible d’y revenir très facilement. C’est d’ailleurs ce que l’on fait la plupart du temps, pour éviter de se perdre dans la profondeur des réglages.

Vous me direz que l’auto est configurable à l’envi et c’est vrai. De là à le faire tous les jours ? Non. On le fait une fois, on oublie un ou deux trucs, forcément, mais on finit par faire avec. C’est en tout cas ce que j’ai fait pendant mon weekend d’essai. Si j’avais possédé l’auto ? J’aurais sûrement fait un effort mais voilà, « faire un effort ». Cela montre à mon sens qu’il est nécessaire pour la marque de revoir encore son interface pour la simplifier et limiter les clics nécessaires pour naviguer.

Dernier point, le « Hey Mercedes » qui fonctionne très bien à la détection, l’auto vous répondant très rapidement. En revanche, pour la compréhension des commandes, j’ai abandonné. Il m’aurait sûrement fallu une petite formation mais là encore, j’ai fini par basculer sur Siri. Comme quoi, même avec cette interface hautement évoluée, on en revient toujours aux smartphones qui ont le bon goût d’évoluer bien plus vite que les automobiles.

L’habitacle de cette A 35 me laisse donc un sentiment ambivalent. D’un côté la stupéfaction devant le luxe d’équipements, de technologies, de matières aussi. Je le redis car c’est fou : la qualité des écrans et des caméras de l’auto, la profusion de capteurs, le doux enveloppement des sièges, ce volant qu’on verrait aussi bien dans une AMG GT, tout est là pour flatter l’oeil, à quelques vilaines exceptions près (il faudra revoir ça sur le facelift).

De l’autre, on a le sentiment qu’à force de trop en mettre sans vraiment refondre totalement son interface pour la rendre aussi simple que celle d’un téléphone moderne, Mercedes-Benz est en train de se perdre dans les détails. Vous me pardonnerez le parallèle qui en fera sûrement ronchonner plus d’uns mais j’ai l’impression d’avoir eu affaire au menu réglages d’Androïd quand je suis pour ma part si heureux de la simplicité des réglages d’iOS.

Question d’habitude ? Sûrement un peu. Mais quand la profusion de réglages rend toute manipulation longue ou complexe, on finit en général par laisser tomber et se frustrer, aussi beau que ce soit par ailleurs. Après, au vu du nombre de Classe A nouvelle génération que je croise, y compris des A 35, il faut croire que je commence à être vieux ou pas assez flexible. Sauf si ces gens-là ont également lâché prise…

Passons à la conduite ! J’avais essayé la A 250 mais aussi et surtout la A 45 AMG (à l’époque c’était dans ce sens-là) et le moins que l’on puisse dire, c’est que cette dernière n’était pas une timide ! Son moulin soufflait très fort et animait les quatre roues, faisant de cette petite boule de nerf une vraie pompe à feu pétaradante et vociférante. En revanche, ça sautillait pas mal (voire beaucoup parfois) du train arrière et la boîte était somme toute perfectible.

La petite nouvelle n’est pas aussi puissante puisqu’elle porte le nouveau patronyme 35. A 35. C’est forcément moins bien qu’une A 45, au même titre qu’une E 43 ne va pas aussi bien qu’une E 63. Ou qu’une E 54. Sauf que les années ont passé et que la vitesse des auto a explosé. Mercedes-AMG vient désormais occuper ce nouveau créneau dont il était absent, celui des petites bombinettes de 300 ch à quatre roues motrices.

Audi S3, Golf R, BMW M140i, Leon Cupra R  ; sans oublier bien sûr les deux roues motrices issues de constructeurs non premium et ne jouant pas tout à fait dans la même catégorie. Il y a donc du monde et quelques références auxquelles s’attaquer. La A 35 s’en sort-elle bien avec sa formule classique : un 2.0 L turbo, 306 ch et un joli 400 Nm tout rond, sans oublier donc le 4Matic qui autorise une répartition allant de 100/0 àà 50/50 ?

La réponse est « oui, oui et oui ». Oui pour la connexion homme-machine, oui pour le comportement dynamique et oui pour le confort. La A 35 fait à mon sens mieux que ses concurrentes certes autrement plus âgées mais néanmoins respectables.

Pour ce qui est du confort, la nouvelle boîte lisse tout, jouant sur le couple, mais sait aussi intervenir rapidement dès que le conducteur fait mine de vouloir s’amuser. Elle comprend vite aussi quand ça se calme et réagit bien aux impulsions en mode manuel, à la montée comme à la descente. Bien. La monte en 19″ m’a semblé en revanche assez ferme, avec des bruits de roulement non négligeables dans l’habitacle et un peu trop de ressauts sur les bosses et trous. Cela irait pour une A 45, c’est un peu trop sec à mon goût pour cette version plus GT.

Sauf que ce constat change une fois oublié le mode Confort. Quoi ? Oui oui, le mode Confort n’est à mon sens pas confortable alors que les modes suivants font fonctionner l’auto comme elle est conçue pour. Au final, le mode le plus sportif semble réveiller la suspension pilotée qui lit enfin la route comme il faut. Bon, plus qu’à calibrer le mode Individual comme il faut…

La direction est quant à elle exempte de reproches. On sent ce qu’il se passe sur le train avant et les transmissions de couple sur le train arrière ne sont pas perceptibles outre mesure ou ne changent pas le ressenti. Les changements de cap sont précis, bien servis par des P Zero qui encaissent sans broncher les 306 ch. On peut donc oublier le comportement de l’ancienne A 45, pas très lisible non plus de ce côté-ci.

Les freins ne sont par ailleurs pas seulement gros pour faire genre : ils freinent fort et bien, suffisamment longtemps aussi car si cette A 35 aime bien aller vite, elle n’est pas non plus comme une MRS Trophy… autrement dit on n’a pas spécialement envie de faire une spéciale de 50 km tambour battant avec elle, mais des petits runs ici et là. GT, vous dis-je.

Le moteur et son échappement sont enfin loin d’être des fainéants mais on a le sentiment de faire face à une coquille d’oeuf bien pleine plutôt qu’à un alambic bouillant. Au delà de 6000 tr/min, il ne se passe plus rien et le moteur tire donc plutôt court. Il tire fort, tout de même.

Les chronos annoncés sont très proches de l’ancienne A 45 de 385 chevaux ! Cela se ressent sur les vitesses de passage en courbe, assez sauvages et sur les relances, avec une motricité sans faille pour servir le couple et la vigueur du moteur sur les mi-régimes.

Plein comme un oeuf donc, à défaut d’être proprement réjouissant, même si l’échappement se fait entendre ici et là, grommelant comme il faut à pleine charge et jappant au lâcher de pied, sans trop en faire. A 35. Pas A 45.

La nouvelle Classe A est bien née et cette A 35 l’est également, venant mettre un grand coup de pied dans la petite niche des bombinettes intégrales. Elle est sûrement moins joueuse qu’une M140i… mais ça c’est avant l’arrivée de la nouvelle. Quant à l’Audi S3, elle est satellisée, âge oblige certes, mais aussi parce que Mercedes a mis de sacrés moyens dans sa petite bombe.

Surtout, la marque a compris qu’il fallait séduire de nouveau le conducteur au travers d’un engagement de conduite moins filtré, plus précis et savoureux ; ceci sans renier ce qui fait la force de l’étoile depuis quelques années : une technologie bien présente, du premium assumé et un style légèrement agressif. Le rajeunissement de la clientèle va pouvoir continuer…

On pouvait donc douter un brin avant de s’installer au volant mais ce doute n’est plus permis après 670 km (et 11.5 L/100 tout de même, il est gourmand ce moulin au vu de mon rythme) à son bord. La concurrence est prévenue, il va falloir faire comme Mercedes-AMG sur les futurs modèles, à savoir mettre les grands plats dans les petits !