Essai – Citroën DS5 Hybrid4

La DS5, je rêvais d’en prendre le volant depuis longtemps, depuis sa présentation en fait, depuis les premiers essais absolument dithyrambiques qui ont parsemé la presse nationale, depuis mon premier coup d’œil sur son habitacle à part, sur sa ligne si tranchante, sur ses choix clivants. L’exclusivité à la française ? J’ai enfin eu mon occasion, celle d’un aller et d’un retour sur ses terres, celles de l’Alsace, là où elle est produite et là où elle fut mise au point par les équipes sochaliennes. Le premier contact est un choc, comme à chaque fois que j’en croise une. Cette voiture est exceptionnelle pour qui l’apprécie, putassière pour qui ne l’aime pas. Pas de demie-mesure quant à son appréciation, on aime ou non cette ligne de break de chasse, on aime ou non les sabres qui soulignent son museau racé. Ma préférence va vers l’option « Black Chrome » mais je dois avouer que la voiture qui m’a été confiée pendant quelques jours m’a séduit. Robe blanche nacrée, roues de 19″ à la ligne si fantasque, brevetée, la voiture a de l’allure, les regards extérieurs, nombreux, sont là pour le confirmer. Mon choix est franc : j’aime la ligne de cette voiture.

Face à cette ligne et à cette couleur de robe, j’ai réagi comme face à la DS3 Racing, j’ai voulu l’enfermer, la placer sous des lumières diffuses, dans un garage, pour mieux révéler une personnalité extérieure tonitruante, baroque et exclusive. Les allemandes au caractère si diffus n’ont définitivement qu’à bien se tenir face à elle.

N’est-elle pas belle, franchement ? Violence de certains traits, une certaine forme de pureté des lignes, le double blason toujours si bien mis en valeur sur la ligne DS, museau généreux et flancs un poil nerveux. Non. Définitivement, je ne suis pas objectif mais j’aime cette voiture, j’ai la sensation de faire face à un objet de caractère, à mettre en opposition aux profils lisses de ses concurrentes désignées par le milieu.

Le ramage extérieur (y a-t-il un autre ramage ?) me plaît mais qu’en est-il du confort intérieur, de cette ambiance qu’a voulu créer Citroën pour son (actuel) vaisseau amiral ? Bienvenue dans un autre monde. Citroën joue pour la DS5 une partition aéronautique. L’environnement se veut technique et enveloppant, centré sur le confort du conducteur sans toutefois négliger le bonheur des passagers. L’espace est conséquent pour chacun des occupants du pont mais la place est belle pour celui qui a la chance de tourner le volant, coupé dans sa partie basse. Les commutateurs sont omniprésents, depuis le ciel jusqu’aux espaces environnants le conducteur. Commandes de toits ouvrants au plafond, la même pour l’affichage tête haute… Sous les doigts, celles des vitres et un joystick pour contrôler l’interface de la voiture tandis que la planche de bord affiche aussi sa technicité. Dans tous les cas, la qualité des matériaux et des commandes impressionne même si certains détails pêchent, à commencer par le cerclage en plastique noir moche de l’écran. Quel contraste avec les commandes ! Tristesse.

Quoiqu’il en soit et sans même parler des sensations à bord qui sont de haute volée, on se sent bien, enveloppé, dans un autre monde. Malgré quelques menus défauts, la qualité de finition est là, les matières de même, tout comme les assemblages. DS5 mérite son statut de haut de gamme de Citroën, offrant une prise de position franche, un beau parti pris en terme d’habitabilité. Les 1200 km de ce voyage ne m’ont pas semblé longs. C’est aussi simple que ça.

Les quelques conducteurs et passagers que j’ai pu transporter le temps de ce weekend m’ont confirmé ce ressenti : celui d’une certaine forme de luxe, d’exclusivité, de confort. La voiture a séduit tout au long de son parcours, que ce soient mes proches ou les badauds alors que je posais négligemment la voiture devant tel ou tel paysage, tentant de saisir cette ligne si singulière.

Le bilan extérieur est hautement positif en ce qui me concerne mais je suis une fois de plus tout sauf objectif. Concernant l’habitacle, j’étais perplexe mais le temps passé à bord m’a convaincu car les quelques défauts perceptibles ne sont finalement pas rédhibitoires. Qu’en est-il alors du bilan dynamique, des performances ?

J’ai eu la chance de mettre la main sur la version Hybrid4 de la DS5, couplant le moteur diesel de 160ch à des batteries développant quant à elles l’équivalent de 40ch. Citroën, ou plutôt devrais-je dire PSA, vend 200ch pour cette motorisation hybride-diesel. Dans les faits, je suis essentiellement resté en mode « Auto », laissant la chaîne de traction décider pour moi ce qu’il convenait de faire, favorisant alors l’utilisation du mode 100% électrique en ville au démarrage et jusqu’à une trentaine de km/h et une récupération d’énergie active en décélération et au freinage. Ce mode s’est à vrai dire avéré très agréable à vivre même si certains dosages sur l’accélérateur généraient des bruits au niveau de la traction / propulsion, à croire que la voiture hésitait entre le thermique et l’électrique. Drôles de bruits à vrai dire pour voiture de ce niveau, bien peu flatteurs.

Reste qu’une fois le bon dosage trouvé, on arrive facilement à annihiler ces bruits, le switch entre la propulsion électrique et la traction thermique se faisant sans soubresauts, le confort restant roi. Il faut en fait adapter son style de conduite à la DS5 Hybrid4 afin de gommer d’éventuels hoquets du système. Au final, l’usage est confortable. Ouf. En ville, on utilise facilement le mode 100% électrique même si son autonomie reste ridicule, le moteur thermique ayant vite tendance à prendre le relai à la moindre accélération franche. Ahhh, si seulement Citroën avait intégré dans ce véhicule des batteries dignes de la Leaf ou de la Zoé. Mais non, il faudra faire avec.

Sur autoroute, pas de doute possible, on carbure bien au diesel (consommation moyenne à 8.5 L/100 pour 1200 km, abattus sans modération sur l’accélérateur) même si la récupération d’énergie est active et que le boost à l’accélération est sensible. Il l’est d’autant plus en passant mode « Sport », les 200ch étant alors complètement disponibles. La voiture procure alors des accélérations franches et une mise en vitesse tout à fait raisonnable, déposant allégrement le reste des véhicules circulant sur autoroute, quelque peu pénalisée par une boîte automatique guère calibrée pour ledit mode « Sport ». Cette mise en vitesse combinée au très bon confort à bord fait qu’on atteint très rapidement des vitesses tout sauf légales si l’on circule sur les routes françaises. Le régulateur de vitesse prend alors tout son sens sur notre territoire… tant on peut dérouler les portions d’autoroute allemande à 190 km/h sans se faire de mal. La voiture est bluffante de confort à haute vitesse, le freinage se révélant être à la hauteur, silencieux et efficace.

Sur petites et moyennes routes, la Citroën renie ses origines… du moins celles de sa marque, au même titre que la DS4 essayée deux semaines plus tôt. Cette Citroën est une Peugeot, d’autant plus qu’elle n’intègre pas la suspension hydropneumatique de la marque, condamnée à mort il y a peu, victime du mariage avec GM. Adieu. Le confort s’en ressent, la voiture s’avérant assez rigide, presque sèche, allemande oserais-je dire ! Une Peugeot ? Oui, c’est ça. La voiture est vive, vire franchement sans roulis, enchaîne les courbes sans montrer de défauts malgré sa masse. Elle est tout simplement saine et sécurisante même si cela se traduit comme je le disais pas une certaine sécheresse des trains, aggravée par la monte en 19″. J’ai en ce qui me concerne bien vécu ce tempérament même si j’aurais vraiment aimé voir la DS5 équipée de cette fameuse suspension. Las, il ne faudra pas compter dessus, ce temps est révolu.

Ligne fantastique, habitacle exclusif (alors que j’avais pas le meilleur niveau de finition), trains roulants de haute volée, moteur performant… La DS5 affiche sans rougir ses qualités même si elle souffre de quelques défauts, elle assume surtout totalement une certaine vision de l’automobile, du design et de l’innovation qu’il me plaît de voir incarnés par une automobile française. L’apprécierais-je sur une voiture italienne, allemande ou anglaise ? Indubitablement et d’ailleurs, ces voitures existent dans d’autres segments. Reste que Citroën a réussi à lancer sur un segment hautement conservateur un véhicule singulier, mêlant sa propre identité à celle de Peugeot pour ce qui est de son comportement pour en ressortir grandi. L’exercice est réussi. Le sera-t-il suffisamment pour aller chercher la concurrence (assumée) allemande ? Je ne le pense pas. Voiture de niche, voiture de connaisseurs, voiture d’amoureux d’une certaine vision de l’automobile, voilà ce qu’est DS5… Il faudrait toutefois une sorte de miracle pour convaincre la horde de moutons amoureux d’allemandes aseptisées de bien vouloir détourner le regard de leur objet statutaire. Gageons que les premiers chiffres de vente se confirment et que DS5 rencontre le succès qui lui est à mes yeux dû, ici et ailleurs.