Combo !!! Comme j’ai environ 28 articles à écrire, je vais grouper, autant vous prévenir. Soirées blogs (&cie), cinéma, on va faire du simple et du concis, pour les bouquins en revanche, chacun aura le droit à sa petite page, question de principe.
Bref. J’ai relativement peu écumé les salles obscures ce mois-ci, une sorte de flemmingite aigüe renforcée par un froid de canard. Mais j’ai quand même vu trois des films qui me faisaient envie (sur la vingtaine qui me tentaient je crois bien, mais bref) : Avatar, La Route et Mr. Nobody. Autant d’univers pour autant de films voyant assez « grand ».
Avatar donc… A première vue, ça poutraille sévère les yeux, il faut bien le dire : c’est beau, c’est très beau, c’est du spectacle, c’est « wow » dans tes mirettes. A seconde vue, tu te dis que tu as quand même déjà vu des trucs de ce genre mais peut être pas en aussi grandiose. Enfin, pour finir, en lisant une quarantaine de blogs différents, tu comprends qu’en effet tu avais globalement déjà vu tout ce qu’Avatar présente comme univers (l’arbre, les schtroumpfs géants, etc.) en BD, en film, en bouquin, etc.
Avatar, c’est donc une synthèse de plein de bonnes choses. Avec un scénario de merde mais un message fort : « les humains sont méchants, ils détruisent la planète »… Woot. Vach’te, novateur le bordel. Ou comment James Cameron découvre l’écologie en somme ! C’est beau un américain qui s’éveille aux concepts de la biodiversité (quand on sait que ledit concept a environ 40 ans (je n’ai plus le nom du mec qui a inventé ça, un américain justement, je vous le trouverai à l’occase).
Un scénario inexistant donc. C’est tout à fait ça. Enfin si, il y a un script quoi, un déroulement ultra prévisible et caricatural de l’histoire du héros qui sauve le monde. Comme dans un space-opéra en SF en fait, sauf que pour le space-opéra, tu es prévenu à l’avance… Et puis il y a aussi la danse tribale transcendantale, et là tu ris en repensant à la même scène dans Matrix Revolution, sauf que dans Matrix Revolution, au moins il y avait de belles filles bien cambrées avec des tshirts humides et bien remplis. CQFD.
Bon, je taille, je grogne, reste que j’ai passé un bon moment de cinéma, enfin, de spectacle. Avatar, c’est ça avant tout : tu débranches le cerveau pour la partie cognitive, tu overclockes la partie oculaire et auditive et tu savoures, tu plonges, tu prends de la couleur dans la tronche, c’est beau et c’est beau. Bim. Fin de l’histoire, ça rentre plus d’un milliard de bénéfices et les gens s’extasient. Nul doute possible en revanche : ce film n’est pas culte, ni ne le sera jamais.
La Route, c’est l’adaptation d’un roman archi-connu qui a donc obtenu le Pulitzer si je me souviens bien. Sacrée distinction, gage de qualité en théorie ! Et le film m’a semblé complètement à la hauteur. Viggo Mortensen et le jeune acteur qui incarne son fils sont bouleversants, les paysages sont dantesques et l’humanité y est subjuguée, dépeinte sans fioritures dans toute son animalité retrouvée, seulement tiraillée par quelques restes de civilisation et de sentiments que l’on dit humains.
Beaucoup d’intensité, beaucoup d’émotions, une lenteur parfaitement maitrisée et des instants de grâce dont la banalité n’a d’égale que la beauté, ce film est une petite collection de bonheurs emprisonnés dans un océan d’horreur et de décrépitude. Ce roadtrip vers le salut n’en finit pas de tirer sur la corde sensible avec plus ou moins de succès en ce qui me concerne puisque j’ai senti à un moment le refus de me projeter, de m’imaginer, de rentrer dans le film tant l’horreur y est tangible.
Je suis donc resté en surface pour ne pas trop souffrir. Mais je n’étais plus tout à fait le même en sortant de la salle car on a beau lire des bouquins de fin du monde et lire des essais plus ou moins réussis, une telle mise en images demeure un choc pour moi.
Enfin, Mr. Nobody, surement l’un des films les plus touffus et inclassables que j’aie pu voir ! Un postulat : le refus de choisir entre son père et sa mère. Et l’imagination dans le cerveau d’un enfant de 9 ans de tous les possibles basés sur sa connaissance actuelle des femmes et les quelques premières minutes du film précédant ce dilemme insoluble.
Voilà. C’est le bordel, vous pouvez vous en douter. Et du coup le film est un bordel aussi, on oscille, on switch de Jared Leto en Jared Leto dans chacun de ses possibles et revient toujours, telle une persistance rétinienne cette question : « pourquoi choisir un chemin alors que tous les chemins sont bons ? » ! Dans chaque univers que crée l’enfant, on se demande, on vit, on ressent, on se prend une claque de vie complètement magnifiée par une réalisation photographique de toute beauté.
Le réalisateur aime jouer avec la profondeur de champ, avec la sensation de flou qu’une très courte zone de netteté met en valeur qui préside à nos choix, à nos certitudes quant aux évènements qui découleront de tel ou tel enchaînement de choix et de décisions plus ou moins insurmontables.
Décider, c’est tuer un chemin, tuer un possible, tuer un amour, tuer aussi des situations moins brillantes et joyeuses, mais potentiellement tuer aussi les hypothétiques retrouvailles avec une Diane Kruger d’une beauté infinie dans ce film, quelle que soit la période et quel que soit l’âge de l’actrice incarnant cette Jane qui reste le fil conducteur de la vie de Nemo.
Les cadrages sont là aussi pour intensifier le discours. Plans serrés, images éthérées ou au contraire d’une netteté publicitaire, accentuation des regards et sublimation des couleurs, le film est un bonheur visuel quelque peu torturé mais terriblement beau.
Reste la morale de l’histoire, ces « choix » dont je parlais tout d’abord… et ce final d’une légèreté insoutenable qui vous colle un sourire identique à celui de ce vieillard remontant le temps ! Il ne faut pas choisir. Jamais. Ou alors en ayant envisagé tous les possibles peut être ? Mais qui le peut, à part cet enfant de 9 ans, confronté à l’impossible ?
Un film empreint de poésie, servi par des acteurs justes à mon sens et qui chahutent au fil des mondes et des fins, au gré des amours et des rencontres inopinées, on en sort chahuté aussi, l’humeur oscillant entre la légèreté et la gravité. Car aller voir ce film, c’est se rendre compte de la somme infinie de choix que nous avons déjà faits au fil des ans et ainsi prendre conscience de l’infinité d’univers que nous avons tués.