Essai – Abarth 124 Spider

Encore une ! C’est un peu ce que vous pourriez vous dire après mes essais des quatre premières déclinaisons de la Mazda MX-5 et de la FIAT 124 Spider, alors que je me tiens face à la dernière des versions disponibles à l’essai, à savoir l’Abarth 124 Spider. A dire vrai, l’exclamation a également traversé mon esprit plus d’une fois pendant le weekend de cet essai sur les rives du Cotentin.

Pourquoi diantre essayer encore une déclinaison de cette splendide base mécanique qu’est la petite italo-japonaise ? Bon, on ne va pas se mentir, j’aime tellement cette auto que je pourrais trouver de nombreux prétextes pour l’essayer encore et encore. Cela finirait assurément par se voir, aussi je garde raison et ne les essaie chacune qu’une seule et unique fois.

Il y a toutefois une autre raison, moins épicurienne. Lors de mes quatre essais précédents, j’ai assurément retrouvé des caractéristiques communes mais chaque auto avait également son petit pan de caractère propre. Le 1.5 au son métallique qui demande à être fouetté, le 2.0 plus rond et plus rigoureux à la fois, le 1.4 au couple généreux et à la dolce vita assumée, le RF enfin avec son petit air de coupé fastback si savoureux et frustrant à la fois.

Alors, avec un patronyme aussi connu et reconnu que Abarth accolé à cette base, il ne pouvait y avoir que de nouvelles choses à découvrir, restait à voir si c’était dans le positif ou dans le négatif !

Extérieurement, il y a assurément du spectacle ! Le design vif et acéré de la base japonaise est oublié pour de bon, la rondeur bonhomme de la version FIAT également ! On est entre deux, sur une base italienne bien sûr, mais avec une agressivité assumée pour ce qui est du decorrum. Le capot noir mat comme sur les anciennes voitures de rallye (pour les reflets parasites dans les yeux) avec son prolongement sur le coffre en jette un maximum ! On m’a dit que c’était trop, on m’a dit qu’on adorait. Pas de demie-mesure. Pour ma part, j’adore et le contraste avec le blanc est saisissant.

La face avant n’en est que plus expressive, avec le regard très réussi de la version FIAT, les petites ouïes noires, la grosse dose de nid d’abeilles et cette lèvre rouge qui aurait mérité un peu plus de sang dans la coloration. C’est un peu trop criard à mes yeux mais au final, ça rend bien, avec le rappel sur les rétroviseurs. La FIAT 124 Spider, vraie réussite d’un point de vue stylistique, prend ici une jolie dose de sportivité extérieure, assumée et vindicative. Une fois encore, on adore ou on déteste. Je le redis : j’aime les gens qui assument.

Sur les flancs, les jolies roues noires mettent en valeur la ligne et le blason central représentant le scorpion maison. Les roues abritent des étriers fixes Brembo peints en rouge. C’est assurément mignon d’un point de vue stylistique mais ça n’apporte rien en performance sur une auto de cette taille, si ce n’est une course pédale un tout petit peu plus courte, rigidité accrue des étriers oblige. A l’arrière, on note avec tristesse les étriers seulement à moitié peints… ils ont oublié la chape, chez le fournisseur. Dommage, ça fait tâche quand tout le reste de l’auto est soigné du côté des détails !

L’arrière enfin ! Là-aussi, la sportivité du bi-ton est assumée et doit être assumée par le propriétaire ! Capot de malle arrière noir mat, logo Abarth bien visible au sommet et un joli 124 Spider chromé qui se découpe parfaitement. Surtout, on note la quadruple sortie d’échappements ! Quadruple. Cela ne vous rappelle pas quelque chose dans la gamme Abarth ? Si, si, Mon-za. Monza. La sonorité risque donc bien d’être au rendez-vous, pour le plus grand bonheur de mes oreilles. S’il y a bien un point sur lequel l’ensemble des variantes essayées jusqu’alors méritait amélioration, c’est celui-ci.

Je ne sais pas vous mais personnellement, je trouve qu’elle a méchamment de la gueule, cette Abarth 124 Spider ! Plus que sa version FIAT, différemment des versions Mazda aussi bien sûr. Il y a la rondeur de la FIAT mais ce zeste de folie sportive qui lui manquait aussi. C’est voyant, c’est un peu « too much » mais après tout, c’est aussi ça l’essence des petits roadsters, un plaisir assumé, un peu d’exubérance. Je n’en attendais pas moins d’une maison comme Abarth et ne suis donc de ce point de vue pas du tout déçu.

Et l’intérieur, alors ? Aussi extraverti ? Malheureusement non. La base est toujours très sérieuse et moderne, comme sur le reste de la gamme, mais la personnalisation Abarth n’est pas assez aboutie par rapport à la rallonge financière demandée. Si le petit volant est toujours parfait, que le levier de vitesse tombe toujours sous la main et qu’on apprécie le petit scorpion en alcantara sous le coude, on ne manque pas non plus de remarquer les sièges.

Il y a bien sûr un logo Abarth et une belle sellerie mariant le rouge et le noir mais on est assez loin en terme de maintien des excellents Recaro qui peuplent en option la Mazda 2.0 et c’est un vrai manque quand on sait de quoi est capable la base châssis de cette auto. Les compteurs sont en revanche joliment modifiés et on note enfin et surtout l’arrivée d’une touche « Sport » à l’ergonomie un brin douteuse en amont du levier de vitesse. On y reviendra.

En bref : c’est sérieux et toujours bien fait, d’un niveau de finition, d’agencement et d’assemblage de belle facture mais il manque à l’intérieur la même touche de folie et de sportivité assumée qu’à l’extérieur. Un volant full alcantara et de vrais beaux baquets pour aller avec la prise pour l’anneau sur la face avant et assumer ce côté track-day ou rallye-day ? La facture finale le demande.

Il est plus que temps de lancer le petit 1400 turbocompressé passé entre les mains de l’officine ! Il développe désormais 170 chevaux et sort 250 Nm à 2500 tr/min, à comparer aux 160 du 2.0 Mazda et surtout 200 Nm à 4600 tr/min. Pas besoin d’être bien calé pour comprendre que ce moteur Abarth s’exploite un peu plus bas, entre 2500 et 5500 tr/min, entre couple et puissance plutôt que tout en haut des tours chez les voisins nippons.

C’était à dire vrai déjà le cas entre le 1.5 Mazda et le 124 FIAT et c’est ce dernier qui à mon sens en sortait vainqueur avec son côté dolce vita vraiment assumé. Qu’en est-il dans ce nouveau match ? Du côté de la sonorité, il n’y en a pas vraiment, de match… La ligne Monza a déjà fait ses preuves et elle continue de le faire sur l’Abarth 124 Spider avec un grondement mesuré mais bien plaisant au quotidien et un bon déluge de grondements une fois le mode sport engagé !

Quel pied que de tirer les rapports à pleine charge avec ce son dans les oreilles ! Il ne manque à dire vrai que les pétarades déjà entendu sur certaines déclinaisons 500/595 mais ce n’est pas un grand manque car cette ligne sait aussi claquer lors de passages de rapport à la volée et envoie un volume sonore déjà conséquent le reste du temps, du genre à vous faire couper le mode sport en croisant la maréchaussée, au cas où… Le pied !

Si la comparaison ne devait se faire qu’au niveau de la sonorité, l’Abarth 124 Spider l’emporterait sans grand combat face à toutes les déclinaisons déjà essayées. Cela ne s’arrête toutefois pas là car il faut aussi passer du côté de la dynamique, avec un poids plus élevé d’une bonne cinquantaine de kilogrammes. Le moteur est certes plus puissant et plus coupleux mais cela ne fait jamais tout.

Le nez de la 124 Spider, déjà un peu plus lourd sur la 124 standard, est un brin moins incisif que sur la Mazda 2.0. Il y a quelque chose de différent dans le transfert de charge, avec des mouvements de caisse tout aussi tenus et prévisibles toutefois. Les gommes sont différentes et cela joue aussi pas mal, avec sur l’Abarth plus de grip qui ne colle pas toujours avec ce léger flotté de la direction.

La base reste très comparable car il faut aussi dire que mécaniquement, au delà du moteur, il n’y a pas grand chose de différent : même excellente boîte de vitesse, même différentiel, même amortisseurs Bilstein, mêmes ensembles triangulés aux quatre roues… L’Abarth 124 Spider profite de son excellente naissance technique pour composer une réponse dynamique tout à fait satisfaisante.

Le freinage modifié satisfait autant que celui de la déclinaison japonaise, raccourcissant seulement un brin sa course et offrant sûrement un peu plus d’endurance lors d’une utilisation circuit, impossible à percevoir lors d’une utilisation route en tout cas. La suspension est toujours à la frontière du confort et de la raideur, verrouillant ainsi partiellement les mouvements de caisse sans jamais les annihiler, permettant aussi une utilisation quotidienne sans dommage vertébral.

Comme je le disais dans mon paragraphe précédent, la direction se montre un brin flottante en son point milieu, une habitude sur la gamme, ne prenant consistance qu’une fois l’inscription faite et le nez de la voiture à la corde. Il y a un petit coup à prendre mais une fois que c’est fait, sur cette Abarth 124 Spider comme sur les autres, c’est tout à fait satisfaisant !

Finalement, on compose avec le couple plus important du moteur (conso à 8.1 l/100 sur mes 1000 km d’essai) et un étagement de boîte logiquement modifié pour emmener la 124 Spider d’un virage à l’autre sans jamais se poser de questions, sentant simplement une masse un rien plus importante et un nez qui pique plus au freinage pour faire la différence. Le comportement de cette Abarth 124 Spider n’est donc guère différent des autres et se montre parfaitement satisfaisant, très efficace avec le différentiel à glissement limité, plus que joueur.

En clair, avec une propension à l’efficacité bien marquée, une sonorité diabolique et réjouissante au possible et tout le reste de l’excellente base technique et intérieur pour achever de convaincre, cette Abarth 124 Spider a un sacré paquet d’excellents arguments ! Si on aime sa ligne extérieure délurée et sa visibilité assumée, c’est un sacré package que les italiens proposent, à dire vrai. Je crois bien que mon cœur balance fortement entre une Mazda 2.0 bien équipée et cette Abarth 124 Spider.

Arrive le moment où il faut signer le bon de commande et où le prix s’affiche, sans GPS, avec clim’ manuelle, sans feux automatiques non plus. On rajoute tout ça, on se met finalement au niveau d’équipement d’une Mazda 2.0 et… plus de 40k€. La Mazda s’affiche à un peu plus de 30k€, soit 10.000 € d’écart !

Vous avez lu mes mots et si l’Abarth 124 Spider est assurément une excellente automobile, réjouissante et enthousiasmante à conduire au quotidien comme avec le couteau entre les dents, à aucun moment il n’est possible de justifier un tel écart de tarification.

Autrement dit, l’Abarth 124 Spider a beaucoup d’arguments pour être la meilleure offre de la « gamme » italo-japonaise mais il va lui falloir revoir ses prétentions en terme de tarification ou il n’en circulera pas beaucoup dans la rue… et beaucoup de Mazda 2.0 se doteront d’une ligne Monza pour lui faire la nique. Ce serait dommage, non ?