Alice au Pays des Merveilles – un Disney, certainement pas un Burton

Tout est dans le titre, j’en ai bien peur… Quelle déception que ce film, cette « séquelle » au roman éponyme, une sorte de retour au Pays des Merveilles pour laquelle le monde entier s’est enthousiasmé en avance. Terrible erreur que de croire que Tim Burton allait pouvoir insuffler tout son génie et sa folie dans une oeuvre elle-même largement dédiée à la folie et riche de divers niveaux de lecture et d’interprétation. Parce qu’ici, c’est bel et bien Disney qui mène la danse et Tim Burton dont on tire les ficelles…

On retrouve donc Alice, LA Alice, qui a grandi et n’a pour seuls souvenirs de son voyage au Pays des Merveilles que des rêves, des cauchemars qui la hantent en permanence. Jusqu’au jour où Wonderland se manifeste à nouveau, l’entraînant dans une nouvelle aventure, un retour au Pays des Merveilles… Jusqu’ici, tout va bien. C’est après que tout se gâte et que le pire se manifeste par la présence (ou l’absence, c’est selon) d’un scénario d’une lenteur consommée, lenteur doublée de ficelles horriblement évidentes. Bref : c’est un Disney, pas un Burton. Pour le fond.

Reste la forme… et c’est là que Tim Burton, présent d’ailleurs lors de cette avant-première mardi dernier, se manifeste. La photographie est splendide, les dialogues sont écrits dans un anglais de haut vol, la retranscription à l’écran du Pays des Merveilles est splendide ! On plonge littéralement dans le terrier du lapin blanc pour se retrouver face à la Reine de Cœur, face au chat du Chesshire et enfin face au Chapelier Fou, splendidement interprété (qui en aurait douté ?) par un Johnny Depp en pleine forme. Bref : c’est un enrobage splendide que livre le réalisateur, un enrobage tellement réaliste qu’il en est confondant…

Mais quelle tristesse de gâcher cette réalisation technique de toute beauté, de la livrer à un scénario atone, sans saveurs, sans tensions, sans surprises ! Quelle tristesse aussi que l’utilisation de la 3D. Décidément, je ne suis pas fan de cette technologie et de ces lunettes qui t’assassinent l’arête nasale et te massacrent les couleurs, pétantes et chatoyantes pourtant !

Bref, Alice est une déception scénaristique, clairement. Mais la beauté du film, son univers et ses personnages (à ce niveau, c’est du tout bon, du génial, du jouissif) sont une justification suffisante pour le déplacement dans une salle obscure. Restera au final la frustration de voir le talent d’un homme, sa folie, ses fulgurances créatrices, complètement bridées par un studio dont la priorité est de faire un film accessible, lisse et convenu à partir d’une œuvre et d’un univers majeurs, complexes et résolument adultes…