La Possibilité d’une Île

Petite analyse par la FNAC … je n'aurais pas fait mieux lol !

A mon sens, l’avantage avec Houellebecq, c’est que tout le monde peut le lire. Etudiants, lycéens frustrés, philosophes en herbe, artisans échangistes ou encore membres de sectes diverses et variées … sont amenés à découvrir le monde plus que particulier de cet auteur devenu depuis quelques années déjà l'archétype du grand romancier populaire.

Lancé comme un produit marketing planétaire, caché aux journalistes et aux critiques sauf autorisation spéciale des éditions Fayard, mondialisé jusqu’à l’os avec une parution simultanée dans plusieurs pays, que vaut vraiment le dernier Houellebecq ?

On a tout d'abord une phase classique, actuelle : le "récit de vie" (sic) de Daniel 1, un comique enrichi et veule, "observateur acéré de la réalité contemporaine" (sous les traits duquel on reconnaîtra aisément Michel Houellebecq lui-même), et en parallèle, en alternance : l’exégèse dans un futur lointain (2000 ans plus tard exactement) de cette vie minable par Daniel 24 et Daniel 25, ses clones.

On ne s’ennuie pas une seconde, on tourne les pages avec un plaisir non feint, on a entre les mains un bon roman d’anticipation… malgré la philosophie et les hypothèses tendance "SF pour tous" de l’intrigue (le clonage comme unique remède à notre finitude, réalisé par une secte ressemblant comme deux gouttes d’eau à celle des raéliens et ayant supplanté les religions classiques …). Au-delà du texte lui-même, on devra surtout admettre cette vérité : Houellebecq est aujourd’hui incontournable. Plus que jamais, il est la caisse de résonance de notre société déboussolée, plus que jamais il parvient à en décrire l’aliénation et la détresse dans des romans aux significations chaque fois complexes, à la fois problématiques et polémiques.

Moralité : un roman à thèse à ne pas prendre au pied de la lettre mais à épouser phrase par phrase, dans ce qu’il transpire en terme de désespoir incarné plutôt que dans ce qu’il conceptualise quand même un peu poussivement. "La littérature contre les idées ?" Houellebecq, au cynisme tout célinien, est trop subtil pour l’ignorer : la littérature est affaire d’émotion et de vision du monde, pas de dissertation philosophique… Ce pourquoi les plus belles pages de son roman, les 150 dernières, sont, à leur manière, d'un sentimentalisme extrême, fruit du désespoir amoureux et de la traversée tragique du Désir du narrateur et de ses doubles …