Essai – Ford Mustang GT Fastback BVA10

Quasiment trois ans après, me voici de nouveau au volant de la Ford Mustang GT, à savoir la version dotée du gros V8 5.0L. De nouveau ? Oui, car la sixième génération de la légendaire « pony car » a bénéficié l’année dernière de quelques évolutions stylistiques et mécaniques, ce afin de lui assurer une seconde moitié de cycle de vie en toute tranquillité, à compter de 2018 donc et jusque très vraisemblablement 2022.

Extérieurement, cela se voit nettement à l’avant de l’auto. La calandre s’est élargie, le capot a été retravaillé et se dote de deux belles ouïes pour la version V8, tandis que le regard a été revu, corrigé et passé au Full LED. Ma version d’essai était qui plus est dotée de la nouvelle teinte Orange Fury, agrémentée des bandes noires optionnelles Racing. Le tout coûte pas loin de 2k€ mais donne une sacrée gueule à l’auto qui, au même titre que la version essayée en 2015, a généré de nombreux échanges, prises de photos, discussions et autres. La Ford Mustang GT est une légende, en essayer une et observer ce qu’il se passe autour de soi en est la preuve constante.

Sur les flancs, on note surtout la présence des roues forgées optionnelles, en 19 » toutes les quatre. Le look a cinq branches est délicieusement rétro. Le blason 5.0 est toujours présent sur les flancs, au cas où quelqu’un douterait… Côté rétroviseurs, ils sont couleur carrosserie. Je me demande s’ils n’auraient pas été mieux en noir pour aller avec la lame du spoiler et celles des bas de caisse, ou encore des contours de vitres. Dernier point à noter du côté des flancs : l’arrivée de Michelin Pilot Sport 4S ! On verra que ça a son petit impact…

A l’arrière enfin, les modifications sont plus légères. Le pare-chocs a été retravaillé pour accueillir un diffuseur tout nouveau et la quadruple sortie d’échappement, désormais actif ! Là-aussi, on verra que ça a son petit impact… car pour le reste, on retrouve les feux qui font la signature de l’auto, ainsi que le grand bandeau noir floqué GT, pour aller avec le petit 5.0 situé sur les flancs.

En somme, Ford fait à la fois le minimum et le nécessaire pour rafraîchir sa Mustang GT, ce afin de bien la différencier de la précédente mouture mais sans trop l’en éloigner. Un facelift dans le plus pur sens du terme, qui va toutefois bien plus loin que la simple cosmétique, nous le verrons plus loin !

A l’intérieur, les changements sont là-aussi importants mais ne viennent pas changer dramatiquement la donne. La Ford Mustang GT évolue avec son temps et se met logiquement à jour du côté des technologies embarquées. Le système SYNC3 dont je vous ai déjà largement parlé via l’ancienne Focus RS et la nouvelle Fiesta ST Line fait son apparition à bord et surtout, les compteurs traditionnels sont remplacés par un combiné numérique. Révolution !

La finition générale n’évolue pas, oscillant entre le sympathique et le plastique sans âme. Le tout est assez bien assemblé et fait sérieux, avec toujours la petite plaque Mustang et la double casquette du tableau de bord. Le frein à main est toujours manuel et on retrouve toujours les contacteurs type aviation au centre. Le levier de la boîte auto rend leur accès un peu malaisé du fait de sa grande longueur. Sachant qu’il ne sert à rien d’autre que changer de mode, une tige plus courte n’aurait pas été un mal.

En parlant des contacteurs aviation, ils ne sont toujours actionnables que dans un sens, vers le haut. Autrement dit, on est toujours obligé de faire le tour complet des modes de conduite / direction disponibles pour revenir au mode précédent ! Pénible, vraiment pénible.

Côté fauteuils, c’est un bon équilibre entre maintien latéral et confort. Les kilomètres à bord ne sont pas un problème au volant de la Mustang GT et on appréciera également quelques attentions comme le maintien de ceinture avec bouton magnet ou encore le joli dessin des sièges, qui sont ventilés ou chauffants, au choix.

L’interface SYNC3 est également de nature à vous faciliter la vie, que ce soit en natif ou en utilisation de Apple CarPlay. Simple, efficace, avec au passage une caméra de recul qui vous aidera pas mal !

Je reviens au volant et compteurs car c’est bien derrière ce premier que se trouve la plus grande des modifications : l’afficheur numérique de toutes les informations de conduite et de configuration (et les petites palettes de la BVA10). Le changement de mode de conduite vient modifier, si on le souhaite, le mode d’affichage. On peut également définir un mode, le MyMode et afficher sa configuration ou la modifier d’une longue pression sur OK afin de se faire sa Mustang GT idéale.

Une pression sur le bouton Mustang du volant permet justement d’accéder à la configuration du mode et son affichage, mais aussi de jouer avec l’échappement actif, afin de choisir qui du mode Circuit, Sport ou Silencieux on souhaite choisir. Car oui, il y a désormais une option qui permet de partir en toute tranquillité le matin, sans réveiller le pâté de maisons… ou à l’inverse une option qui permet (enfin !) de faire sonner à plein tubes le V8 5.0L de la Mustang GT !

La touche « Réglages » du volant n’est pas vraiment facile à identifier et il faut chercher un brin avant de comprendre que ces engrenages permettent aussi de rétablir l’affichage standard de l’auto, à savoir l’ordinateur de bord et toutes ses informations un brin plus utiles que le mode de direction / conduite / échappement. De ce point de vue, l’ergonomie entre les deux modes Mustang / Réglages est loin d’être une évidence.

Toutes ces évolutions rendent la Mustang GT nettement plus actuelle ! La mise à jour du système d’info divertissement est un plus évident mais clairement, l’adoption de ce nouveau combiné d’instrumentation est une petite révolution pour l’auto, même si elle se fait au prix de la disparition du cliché mais sympathique « Ground Speed » du tachymètre. C’est bien le seul problème, au delà de quelques choix d’ergonomie discutables, car ces nouveaux compteurs sont une réussite.

Maintenant, on a tout de même pas mal parlé de cosmétique… à l’extérieur mais aussi à l’intérieur. Vous aurez toutefois noté « échappement actif » et « BVA10 » dans les mots ci-dessus. Il faut aussi ajouter à cela les termes « Magneride », « plus de puissance » et « toujours autant de virgules »… Allez, passons aux choses sérieuses, faisons grogner ce gros glouton de V8 !

Glouton, glouton, vous allez prendre peur ! En fait, il ne faut pas car la BVA10 a ceci de magique que quand on la laisse travailler dans son coin, elle optimise en permanence, comme sur la Lexus LC 500 par exemple, le régime moteur et diminue d’autant la consommation ! Bilan de mon essai de 1250 km ? 10.7 L/100 ! Je vous rappelle qu’il s’agit là d’un V8 de 5.0L, sans Start/Stop, sans désactivation de cylindres… alors oui, si on attaque, le réservoir de 61L se vide à vue d’œil mais en moyenné, c’est plutôt raisonnable.

Ce qui est certain en revanche, c’est que le bloc s’exprime nettement mieux qu’avant. Il fait certes quelques chevaux de plus pour culminer à 450 ch à 7000 tr/min et 527Nm à 4600 tr/min mais surtout, il respire mieux grâce à cet échappement actif qui lui donne la voix qu’il aurait du avoir dès sa sortie. On se rappellera que la version EcoBoost faisait presque plus de bruit que l’ancienne GT et ce temps-là est désormais révolu.

Dès le démarrage, les 8 cylindres grondent sourdement et en mode Sport ou Circuit, chaque pression sur l’accélérateur à bas régime génère son content de vibrations, grognements et borborygmes tout à fait réjouissants ! En haut des tours, il hurle aussi nettement plus mais trahit sa nature américaine là où le moteur de la LC 500 se faisait plus musical. Il n’y a dans le V8 de la Mustang GT pas grande musicalité, seulement une grande force de caractère à l’américaine, en bas des tours.

C’est là, dans cette plage de régime où il fait bon cruiser et dérouler que l’on fait trembler arbres, façades, passants et immeubles (comme lors de mon retour pendant la première période de cette finale de coupe du monde… artères parisiennes désertes, des centaines de badauds me priant de « faire du bruit »… et autant de virgules que faire se pouvait avec des policiers hilares et souriants pour témoins).

Il faut aussi bien dire les choses : cette boîte BVA10 n’est pas faite à mes yeux pour autre chose que pour le cruising. L’absence de possibilité de décaler le levier de vitesses vers un mode manuel en est la première preuve. Alors oui, l’auto vous laissera bien jouer des palettes sur demande, ces dernières s’affichant alors au combiné de part et d’autre du rapport engagé, mais au bout de quelques secondes d’inactivité, elle reprendre la main pour repasser en automatique, quitte à ce que ce soit au mauvais moment et avec un supplément de mise en vitesse du fait du passage au rapport supérieur.

Quel que soit le mode engagé, c’est comme si cette boîte ne voulait pas qu’on la brusque. Trop lente en modes normaux, elle est en revanche très rapide en mode Sport+ ou Track, claquant bien et rétrogradant sans peine pour être au bon régime. En revanche, elle est à mes yeux trop agressive dans ces modes les plus extrêmes avec un vrai manque d’intelligence dans la régulation et la perception des changements de rythme qui la rend à mon sens inutilisable en conduite sportive.

Impossible d’augmenter le rythme pendant quelques kilomètres avant de se remettre en cruising sans changer de mode. La boîte reste énervée, attendant désespérément qu’on la chahute, quatre rapports en dessous de celui correspondant au rythme coulé qu’on a adopté depuis… c’est comme s’il n’y avait pas trop de corrélation entre l’appui pédale accélérateur et la boîte, cela ne communique pas assez.

En bref : cette boîte 10 est d’une douceur indubitable, s’accouple avec brio au V8 dans 80% des cas et ne renâcle que de temps en temps, notamment sur certaines phases de transition à basse vitesse, hésitant parfois un brin avant d’enquiller la seconde ou la troisième, ou peinant à l’inverse à rétrograder. C’est du détail à dire vrai, pas de quoi grogner. En revanche, l’utilisation sportive hors attaque intégrale est à proscrire, il faut plutôt privilégier un mode « momentum », sur le mouvement, dans la fluidité et sans attaque généreuse.

C’est d’ailleurs bien dommage car pour le reste, la Mustang GT a vraiment progressé d’un point de vue dynamique. L’adoption moyennant 2000€ de la suspension adaptative Magneride change dramatiquement le contrôle de la caisse d’un point de vue cabrage et plongée. Là où l’ancienne Mustang GT visait le ciel ou plantait du nez sur les franches accélérations et freinages, cette nouvelle mouture est nettement plus verrouillée sans devenir inconfortable.

Combinons ce bon maintien de caisse à une excellente filtration et on se retrouve avec une auto tout aussi capable de faire des kilomètres et des kilomètres d’autoroute dans un excellent confort (la Bretagne, c’est pas tout près hein, et j’étais frais en arrivant et en revenant !) ; mais aussi d’absorber des routes bosselées en toute sérénité et sans mouvements de caisse parasites. C’est vraiment un grand progrès que cette suspension sur la version GT, lui redonnant malgré sa masse une plus grande propension à vouloir du sport !

C’est aussi vrai grâce aux gommards qu’a choisi Ford. La Mustang GT se marie bien avec les excellents Pilot Sport 4S. La directivité, vraiment agréable avec le mode Sport de la direction, qui offre une consistance idéale bien qu’un brin collante, est réelle et bien meilleure qu’auparavant. L’auto semble vouloir s’inscrire avec plus d’envie et plonge un peu plus dans les cordes, me rappelant les sensations vécues à bord de l’ancienne version EcoBoost.

Bref : ça va beaucoup mieux du côté de la dynamique véhicule pour la ‘stang ! On est à dire vrai plus bien loin des sensations vécues à bord de la Corvette C7 essayée il y a quelques années et on est surtout à un beau point d’équilibre entre la voiture pour le cruising et le voyage et une petite dose de sportivité, malgré les 1830 kg à vide de l’engin.

Avec ses plus de 400L de coffre, sa maniabilité très raisonnable malgré les quasi 2m de large, la Mustang est qui plus est plutôt facile à vivre. Bon, pour ce qui est des places arrière, seuls de petits adultes ou des adolescents qu’on aime pas trop pourront y loger… Il faut plus envisager la Mustang GT comme une 2 places, avec de temps en temps le transport de quelques personnes sur de courtes distances.

Parlons prix aussi rapidement. 50k€ pour la version de base… avec donc 2k€ vraiment utiles pour l’option Magneride. C’est simple, malgré les 10k€ de malus, il n’existe toujours rien d’équivalent sur le marché, capable de vous offrir un légendaire V8, une silhouette légendaire également et le bonheur sans cesse renouvelé de se balader avec ; sans oublier les échanges passionnés et passionnants qui vont avec tous les témoins de son passage.

J’attendais beaucoup de cette boîte BVA10, sûrement trop à dire vrai. Si l’ensemble de l’auto a vraiment progressé d’un point de vue dynamique, la boîte n’est à mon sens pas au même niveau et reste un cran en dessous de ce que ce package châssis/moteur/liaison au sol sait désormais faire ! Un vrai mode manuel ou une meilleure gestion électronique en mode Sport+/Track est ce qui lui manque, rien d’autre.

Déjà terriblement attachante à la base, la Ford Mustang GT évolue donc dans le bon sens, corrigeant quelques défauts de conduite, faisant le plein de caractère avec un moteur digne d’un avion de chasse et une sonorité capable de vous coller des frissons et un petit rire nerveux à chaque coup de pédale. Elle est toujours aussi prompte à dessiner des virgules sauvages sur le bitume mais est aussi saine et très efficace dans le sinueux… mêlant idéalement son passé de muscle car à la nécessaire efficacité moderne.

Si je devais faire un choix aujourd’hui, je crois que je la prendrais en Convertible, avec cette boîte BVA10. Pour cruiser, pur et dur, à l’américaine. L’autre choix, pour envoyer un peu plus de bois sur les départementales encaissées d’un bel arrière pays, serait d’embarquer la BVM6 et allez, soyons fous, la version Bullitt !