Aller au théâtre, de temps en temps, c’est une vraie bouffée de plaisir, de rires et d’émotions… mais quand on y va peu, on espère que ce sera bien, voire très bien. Cette fois-ci, c’était au Lucernaire pour « Le Dernier Numéro » de Hélène Ventoura. Un petit théâtre tout mignon, une salle « Paradis » tout en haut d’un gigantesque escalier et située sous les toits, on attend l’entrée sur scène de ce clown qui parle.
Le dernier numéro. Cabaret mortel… Quelque part, juste avant la mort, il y a un cabaret pour ne pas sombrer dans l’oubli. On vient y épater son monde, juste avant de mourir. C’est immanquablement le dernier endroit où l’on vit. C’est là que moi je vous convie.
Et là, après la lecture de ces quelques lignes, vous cherchez le lien entre « clown qui parle » et ces lignes quelque peu dépressives et noires. Le lien existe, Hélène Ventoura est un clown drôle, triste, dépressif, parfois, mais aussi potache, parfois. Elle fait tout, elle nous réveille dès son entrée en scène, nous accroche sur le fil de son histoire et déroule ensuite ses personnages, ses scènettes.
L’oubli. Le droit à l’oubli. Elle prend le rôle de ces artistes qui viennent jouer un dernier numéro, faire rire leur monde et ensuite disparaître, s’évanouir dans les limbes du spectacle. Et c’est diablement poétique, un peu acerbe, un peu triste et drôle à la fois. C’est d’une finesse remarquable et on rit, un peu douloureusement, mais on rit.
C’est ça la magie de ce spectacle par rapport à tous les one-man-show du monde, formatés pour faire rire grassement, ici on doit réfléchir, on doit se laisser aller et le rire vient alors, naturellement. On retrouve un peu d’âme de clown, un peu d’âme de gosse quelque peu cynique et on observe Hélène Ventoura se balader sur scène, gracieuse et empruntée à la fois, joyeuse et dépressive d’un instant à l’autre. Ses expressions et ses regards sont autant de projections de ce qu’elle raconte, un parfait contre point à sa voix, un peu stridente et haut-perchée par moments, délicate et soyeuse autrement lorsqu’elle chante.
Au final, c’est beau, c’est doux, ça pique un petit peu et ça nous remue avec délicatesse. On en ressort comme sur un petit nuage, on cherche les détails qu’on a forcément manqués, on se rappelle certaines phrases, certains jeux de mots croustillants, certaines situations… J’ai bien envie d’y retourner je crois.
D’ailleurs, pour une place achetée, une place offerte jusqu’au 2 novembre… alors n’hésitez pas, allez voir ce clown pas comme les autres.