24h du Mans – la journée test en compagnie de Ford

Cela faisait bien longtemps que je n’avais pas mis les pieds sur un circuit automobile dans le cadre d’une compétition automobile. Pis, cela faisait également bien longtemps que ce circuit n’était pas celui du Mans, dans le cadre des légendaires 24 heures de la ville éponyme. Impossible donc de manquer l’invitation de Ford à venir assister à la répétition générale : la journée test.

La marque a gagné les 24 heures à plusieurs reprises et a d’ailleurs remporté l’édition 2016 dès son retour en GTE Pro avant de finir second en 2017 au terme de tous derniers tours d’une intensité folle, toujours dans la même catégorie. A l’époque, les Porsche 911 RSR avaient marqué le pas et laissé la place à Corvette, Aston Martin et Ford, donc.

L’édition 2018 s’annonce d’ailleurs plutôt folle puisque Ford a bien l’intention de gagner et engage pas moins de quatre autos, numérotées 66, 67, 68 et 69. Les deux premières sont engagées par l’équipe Ford Performance UK tandis que les deux dernières arrivent tout droit des États-Unis, la marque faisant ainsi front tant en WEC qu’en IMSA.

Le fait est que les autres n’arrivent pas non plus les mains vides, Porsche ayant décidé de mettre le paquet avec également quatre autos engagées, tandis qu’Aston amène sa nouvelle Vantage, que Corvette est toujours là et qu’un « petit » nouveau fait son retour avec deux autos, à savoir BMW avec sa M8 GTE. En clair : le spectacle ne sera peut-être pas en LMP1, ni en LMP2 mais bel et bien dans la catégorie GTE Pro.

Ce n’est pas pour me déplaire car ces autos, si elles sont indubitablement plus lentes que les prototypes du fait de leurs brides, sont superbes et « ressemblantes » aux véhicules à quatre roues que l’on peut croiser dans la rue. L’ACO et la FIA ne sont sûrement pas insensibles à cela ni au spectacle qui va avec, encore moins à la pénurie d’autos en LMP1. Je digresse mais des GTE Pro débridées feraient un beau spectacle…

Enfin, je rembobine rapidement. Dimanche matin. Les pilotes sont déjà sur place et les équipes avec. L’objectif est de tester les équipes, les ravitaillements et bien sûr de faire les tours obligatoires pour les rookies comme Fernando Alonso ou Jenson Button (toujours rigolo d’écrire rookie et ces noms dans une même phrase). Moi, je suis à Paris, dans le XVIIème et je dois choisir ma propre monture.

La Ford Mustang a fait peau neuve il y a quelques années et elle a profité de l’année dernière pour entamer sa mue de mi-vie, adoptant un peu plus de poneys, se repoudrant les naseaux et bénéficiant en passant d’un peu plus de technologie et d’une nouvelle boîte 10. Pour ma part, je prends le volant d’une version Fastback en boîte méca 6. Direction Le Mans, en faisant trembler les façades parisiennes du son de l’échappement passé en configuration « circuit ». Quelle riche idée cette possibilité !

Les quelques kilomètres sont rapidement avalés mais je ne vais pas saouler ici avec un essai de la nouvelle Ford Mustang, ce sera pour un essai détaillé un peu plus tard, dans quelques semaines plus exactement ! Une chose à dire toutefois puisque ce sera sûrement avec la BVA10 : la boîte mécanique s’est légèrement assouplie en terme de débattements et ce n’est vraiment pas un mal.

M’enfin, c’est que ça commencerait à ressembler à une année Ford, 2018, sur le blog… surtout si on considère que la Fiesta ST sera bientôt disponible à l’essai. Hem.

Bref : le V8 5.0L a bien glouglouté et enchanté mes oreilles ainsi que celles de JB, mon passager / pilote du jour. Nous voici au MMA Arena pour récupérer nos accréditations, en compagnie des copines du jour, à savoir un beau petit convoi de 5 Mustang. Autant vous dire que nous avons eu un joli petit succès en accédant à l’enceinte du circuit. La Mustang reste une légende, moderne ou pas.

Arrivés à l’hospitalité Ford, il est déjà temps de rencontrer l’un des pilotes Ford, Olivier Pla. Il est engagé au volant de la #66 en compagnie de Billy Johnson et Stefan Mücke et a « plutôt » bien entamé sa saison 2018 avec une belle victoire en ELMS et surtout la victoire aux 6h de Spa avec un dépassement tout à fait monumental dans le Raidillon (je vous invite à chercher la vidéo et bien fermer la bouche / vous asseoir avant de cliquer sur « lecture »).

Olivier Pla ne semble pas être un grand démonstratif, il est posé, calme, à l’écoute, attentif et concentré ; pesant ses mots mais sans les retenir, dégageant une certaine franchise pile à l’équilibre entre la prudence et la naïveté du jeune pilote qui raconterait tout et n’importe quoi. C’est l’occasion d’en savoir un peu plus sur ce qu’il pense de la catégorie GTE Pro, de ses adversaires, de l’évolution de son auto limitée à de belles évolutions pneumatiques.

A l’heure où nous parlons, c’est la confiance que l’on ressent dans ses propos mais aussi beaucoup de prudence. Ford, dit-il, ne cache pas son jeu et les chronos des Ford GT sont ceux à quoi il faut s’attendre et à cet instant, les quatre voitures sont aux quatre premières places, avec Porsche sur les talons. L’évolution pneumatique et la refonte du set-up de l’auto qui va avec vont-elles suffire ?

La réponse du pilote se fait autour d’un demi-sourire… 24 heures, c’est long. Il le sait, il a 36 ans et une sacrée expérience derrière lui, en compagnie d’un beau palmarès ! Toujours est-il qu’il est confiant et – oui – détendu. Rassurant pour la marque, d’avoir des pilotes tout sauf fébriles et aussi posés.

Direction les stands pour tâter l’ambiance… Je retrouve des souvenirs de dix ans mais aussi une tension palpable. Le patron de Ford Performance est là, l’air concentré et un rien grave. Les ingénieurs dans la salle de contrôle sont absorbés par tout ce qui leur passe sous les yeux. Les autos sont bien là où ils les attendaient, mais on est encore loin du rythme de qualifications.

Les mécaniciens patientent, certains par terre, d’autres posés sur les paillasses. Le stand est calme, si calme, alors que le tonnerre mécanique résonne dehors. Il faut prendre du repos tant que c’est possible. Je me souviens de journées interminables, de la préparation des autos, du calme soudain quand l’auto tourne et qu’on ne fait plus grand chose, tout étant bien préparé et rôdé.

Soudain, la ruche qui s’excite et bourdonne. Pit. Les autos rentrent, dans un nuage de poussière, se jetant sur les lignes blanches qui marquent leur place. Un coup d’air et les vérins sont sortis, l’auto en l’air, prête à changer d’enveloppes, prête à se refaire une beauté si besoin. Changement de pilote, parfois, pas tout le temps. Andy ou Olivier se préparent, l’air grave, l’œil ailleurs, déjà partis mais toujours là pour échanger des mots avec leurs mécaniciens.

La concentration est partout, à géométrie variable. Constante et sûrement un peu diffuse chez les ingénieurs, ponctuelle et fulgurante chez les mécaniciens, en durée et intense pour les pilotes. Sans oublier tous les autres qui gravitent dans l’orbite de ces automobiles extraordinaires qui font trembler les tribunes du Bugatti. Quelle ambiance, toujours. Quelle vie de fou, aussi.

En parlant d’automobiles extraordinaires, il est temps d’aller observer les différents participants, depuis la Dunlop, depuis les tribunes et bien sûr depuis la belle terrasse panoramique du restaurant qui domine le paddock, ouverte à l’occasion de ces journées. Il y a réellement foule pour cette journée test, je ne m’attendais à dire vrai pas à autant de monde sur place ! Effet Alonso ? Sûrement. Tant mieux.

Me voici sur le bord de la piste, bêtement sans bouchons d’oreille ou casque antibruit. A quoi ai-je donc pensé ? Sûrement à une Mustang et pas à une Ford GT qui gronde à mes côtés, à une Corvette qui beugle du grave ou encore aux 911 RSR qui semblent déchirer l’air en allant claquer les 9000 tr/min de leur merveilleux flat6 atmo… Qu’est-ce que ça envoie, dediou !

Les LMP1 sont aphones en comparaison, certaines LMP2 sont sonores, tout comme l’ancienne Aston Vantage qui fait de la résistance, les 488 GTB ont perdu leur voix avec l’adjonction du turbo et la M8 GTE se fait surtout entendre au rétrogradage. Les nouvelles Vantage ? Belles, mais un brin silencieuses aussi. La Ford GT fait office de compromis avec son V6 tantôt pétaradant, tantôt grondeur.

Il n’empêche, les Porsche 911 RSR font peur. Pourtant, elles sont derrière. Comme si leur bruit terrible était décorrélé de leur vitesse réelle. Les BMW cachent-elles leur jeu ? Les nouvelles Aston Martin ? On ne le saura pas avant ce weekend, avant les qualifications aussi bien sûr.

Les Porsche ? Elles sont là. En fin de session, alors bien sûr que la piste change en permanence et que l’orage menace, les RSR claquent les deux meilleurs temps de la catégorie. La marque a été piquée au vif l’an passé et annonce un peu la couleur. Les quatre Ford GT sont juste derrière, les deux européennes (anglaises… ?) suivies des deux américaines, avec une BMW, les Ferrari et Corvette en embuscade derrière. La bataille s’annonce furieuse.

La journée s’achève. Il paraît qu’il faut rentrer sur Paris. Heureusement, c’est en Mustang que cela se passe, toujours la même belle rouge V8 à boîte mécanique. Je savoure tandis que mes oreilles résonnent encore du son des Ford GT et Porsche 911 RSR.

Quelle bataille qui s’annonce, quelle furie ! Le programme du weekend prochain s’annonce fabuleux en catégorie GTE Pro, peut-être même plus encore que l’an passé… c’est dire !

Plus que quelques dodos avant les qualifications. Plus que quelques paires d’heures avant le départ.

24 heures de plus avant l’arrivée de LA course automobile.

Que le meilleur gagne.