On peut rire de tout …

… mais pas avec tout le monde ! C’est une des citations les plus connues et courues du comique cynique Pierre Desproges. Je ne pense rien vous apprendre sur ce coup là. De même, vous conviendrez surement du fait qu’on l’utilise un peu tout le temps à tort et à travers.
Dernier exemple en date, un billet sur le JDG montrant une évolution de papy Jobs : après le MacBook Air, voici le Steve Jobs Air … Bon. Il paraît que le monsieur va bien, donc finalement la grogne générée dans les commentaires était finalement une tempête dans un verre d’eau. Toujours est-il qu’un abruti de commentateur s’est  cru permis de se retrancher derrière l’ami Desproges. Et là, j’ai envie de dire que oui, on peut rire de tout, et même avec tout le monde, mais il y a une certaine manière de faire …
Exemples : un juif qui se rit du destin de son peuple, un cancéreux qui rit de son cancer, un handicapé qui fait des vannes sur son handicap … Bref, des gens qui rient de ce qu’ils connaissent ou vivent … De même, les proches de ces personnes développent souvent un cynisme assez puissant face à la douloureuse réalité. Le rire est en effet plein de vertus et facilite parfois la tâche de ceux qui restent.
Le dernier cas, ce sont ceux qui ne connaissent rien de tout cela, ceux pour qui tout va bien, ou tout semble bien aller, au choix. C’est là que la « manière » intervient à mes yeux et il y a deux écoles : les gens intelligents et les gens cons. Pas de demie mesure.
Les intelligents se repèrent assez facilement, ils ont l’humour facile, le cynisme affleurant, la noirceur toujours prête à être dégainée … J’en avais un bel exemple au travail, on le surnommait Mr Méchant à une époque. Quand on creuse un peu ou qu’on écoute le rire de ces personnes, on se rend compte qu’il y a quand même une sorte de douleur, un véritable cynisme, l’aspect blasé de l’âme qui ressort. Une sorte d’humanité, au fond.
Les cons ne s’encombrent pas de ces bleus à l’âme, ils lancent leurs horreurs et rient. Voilà. Ils sont creux, ils ne prennent absolument pas conscience de l’horreur de leurs propos, du mal profond qui se cache dans les cibles de leur blague : maladie, guerre, massacres, racisme, xénophobie, homophobie, sexisme …
Voilà, la manière est là. Quand on rit de quelqu’un ou de quelque chose, il ne faut jamais perdre de vue la triste réalité sous jacente, ni sa propre situation, ni son propre vécu, ni la poutre que l’on a parfois au milieu de l’œil.  Sauf si l’on veut être con, bien sûr.