Essai – Mercedes-Benz E 400 4MATIC Coupé Sportline

Il y a un an, j’essayais la nouvelle Classe E dans une version 220d censée représenter l’entrée de gamme et j’en ressortais avec le sentiment d’avoir voyagé dans une auto destinée à avaler des kilomètres sans jamais fatiguer son conducteur, offrant un parfait mélange de luxe, d’agrément et de technologie. J’étais conquis.

Depuis, la nouvelle Série 5 est arrivée et m’a rappelé quelques autres bons souvenirs et sensations, plus d’engagement au niveau de la conduite. Il me fallait donc reprendre le vaisseau E pour une nouvelle expérience, plus musclée, plus singulière aussi.

C’est ainsi que je me suis retrouvé au volant de la dernière silhouette de la gamme, la version Coupé ; avec une transmission 4MATIC destinée à jouer la carte « daily » et avec un combo Edition 1 + V6 pour jouer celle de la performance. Autrement dit, la Mercedes-Benz E 400 4MATIC Coupé.

Cette version que j’essaie aujourd’hui est assez radicalement différente de celle essayée un an auparavant. On commence évidemment par la silhouette de Coupé versus la Berline pour ce qui est des évidences. Les lignes sont élancées, assez fines à dire vrai, parvenant à rendre dynamique et pas trop massive une auto qui en impose en terme de gabarit avec pas loin de 5 mètres de longueur.

Sans atteindre la finesse de croupe d’une Classe C Coupé, elle n’est pas non plus aussi épaisse que la S Coupé, c’est un compromis que je trouve réussi à maints égards, y compris dans cette coloration blanche et mate doublée de la finition Sporline. Les roues sont largement chaussées et posés sur des gommes à la taille basse, les ailes semblent musclées sans trop en faire et la jupe arrière se troue de deux trompettes intégrées qui semblent vouloir annoncer une note dynamique à défaut d’une sportivité exacerbée.

Vous m’avez compris : elle est racée, imposante mais fait également montre d’une certaine retenue que n’auront pas forcément les hypothétiques déclinaisons 43 et 63 siglées Mercedes-AMG. J’aime assez, c’est nettement plus expressif qu’une « banale » Classe E standard, sans être ostentatoire.

Les flancs ne sont guère sculptés si l’on excepte les hanches qui dépassent un peu. On note simplement les roues, une fois de plus et le badge Edition 1, un petit pack d’apparence intérieure et extérieure facturé 6k€. Les rétroviseurs sont en piano black, s’intégrant en quelque sorte dans les grandes arches dessinant un arc sur la partie supérieure de l’auto et donnant son élégance à la vue de 3/4 arrière.

C’est en réalité du côté de la face avant que la transformation est la plus notable, entre la ligne Fascination précédemment essayée et celle-ci, la Sporline. Le jonc de chrome entourant la calandre est nettement plus fin, ce qui me plaît bien plus ! L’étoile à cinq branches a disparu du capot pour réintégrer le centre de la calandre et les prises d’air aux menus flaps noirs sont agressives, sans se montrer démesurées. Une fois encore, dynamisme plus que sportivité ; une gueule reconnaissable mais pouvant tout de même se montrer à peu près discrète.

Bon, cela reste une E 400, Coupé, blanche et mate, avec des roues AMG et une calandre qui semble vouloir vous manger en autant de coups de crocs qu’elle a d’inserts chromés… alors il va falloir assumer un peu, malgré tout. Je n’ai pas compté les regards pendant le weekend, mais ils furent nombreux et pour certains vraiment admiratifs. Je les comprends, je la trouve vraiment élégante et racée à la fois.

Cette élégance racée et dynamique se retrouve aussi à l’intérieur. Cette E Coupé est définitivement une mini S Coupé, présentant un vrai saut technologique et qualitatif par rapport à ce que l’on peut trouver sur les gammes A et C. Je bénéficie bien sûr d’une version bien dotée en options mais la dotation de base est pléthorique et les quelques milliers d’euro supplémentaires demandées pour les packs Premium Plus, Comand Online ou encore le pack d’assistance à la conduite permettent de bénéficier d’un ensemble technique dernier cri.

Sièges chauffants et ventilés, mélange de cuir blanc et noir parfaitement agencé et cousu, assises bien enveloppantes mais confortables comme un lit d’hôtel 4 étoiles, plaquages façon aluminium et carbone sur la planche principale et autour des commandes de siège, volant à méplat mêlant cuir et alcantara, touches bien finies dans les portières et au centre de l’habitacle, faut-il en rajouter et parler de nouveau des petites touches tactiles sur lesquelles on slide depuis le volant ? Ici, comme sur la 220 d, tout n’est que luxe, calme et volupté.

La technologie est tout autant au rendez-vous avec le double écran, plus ou moins pratique à allumer pour ce qui est du second puisqu’il faut aller chercher le bouton de l’autre côté du bloc COMAND qui trône sur le tunnel central. Plus le temps passe par ailleurs et moins j’apprécie au final le double bloc molette / pad. Je crois que j’aimerais le voir fusionner en un, comme chez la concurrence et ce d’autant plus qu’on peut désormais depuis le volant commande au pouce soit l’écran devant soi, soit l’écran central. Y a-t-il donc encore besoin d’une telle complexité ergonomique au centre de l’habitacle ?

Bon, pour le reste, les fonctionnalités sont complètes et l’affichage pratique avec les raccourcis pour les favoris ou pour les applications principales. On configure donc sa voiture sans aucun problème, entre paramètres habituels et autre raffinements de couleur liés à la catégorie de voiture dans laquelle on s’installe. Rappel, une Classe E 400 Coupé se négocie 75600€, ma version d’essai 94900 €… Il est donc logique, à ce niveau de prix, de n’avoir rien à redire si ce n’est un ou deux détails d’ergonomie et d’appairage parfois capricieux avec l’iPhone (BT vs. CarPlay vs. USB… l’un voulant gagner face à l’autre !).

Si j’ai particulièrement apprécié les affichages et la configuration que je me suis concoctée pendant mon weekend d’essai, je n’ai en revanche pas essayé COMAND Touch, qui permet de prendre quelque peu contrôle de son auto. En revanche, il faut prendre quelques lignes pour parler d’une fonctionnalité qui a évolué et qui va très rapidement dans le bon sens : la conduite autonome.

Cet essai, réalisé en Auvergne, m’a permis de passer de nombreuses heures dans la voiture mais aussi d’expérimenter une sortie et une rentrée à Paris en plein weekend prolongé. Même en essayant de les éviter, je me suis donc retrouvé dans les bouchons un certaine nombre de fois et j’en suis ressorti tout sauf fatigué. La raison à cela est l’indépendance salvatrice de la E 400 Coupé ! Régulateur enclenché, la voiture s’occupe de presque tout de 0 à bien plus que 130 km/h, régulant finement sa vitesse et ses freinages par rapport aux voitures qui la précèdent.

Dans les bouchons, c’est un régal qui permet de ne plus du tout toucher le volant, de relâcher un tout petit peu la vigilance pour ne plus se concentrer que sur les rétroviseurs afin de favoriser le passage des deux roues. Pour ce qui est devant et derrière, la E se débrouille comme une grande et il n’y a guère que les démarrages / arrêts presque instantanés qui la perturbent, avec un peu trop de pression de frein qui génèrent des arrêts un peu brusques.

C’est simple, pendant le weekend, je n’ai pas une seule fois eu besoin de corriger la trajectoire ou de toucher les freins pour la reprendre en mains pendant les bouchons, de la circulation en file jusqu’à 130 km/h ou encore en autonomie sur l’autoroute, sans trafic ou presque. Seuls les interruptions de marquage un peu longues viennent bousculer la donne, auquel cas la voiture demande de reprendre le volant, jamais autrement.

Un tel niveau d’autonomie, en 2017, reste bluffant de fonctionnement, jusqu’aux changements de ligne sur déclenchement du clignotant dans un sens ou dans l’autre. On est bien sûr encore loin de l’autonomie complète mais le remarquable fonctionnement sur nationales et autoroutes va dans le sens d’une conduite apaisée et sécurisée. C’est parfait pour les longs weekends, les personnes n’ayant plus forcément la force ou l’autonomie pour de longs trajets…

C’est triste d’un point de vue conduite et bien sûr, cela va dans le sens opposé à ce que j’aime dans une voiture mais je trouve à ce niveau d’autonomie d’autres intérêts. Gérer les situations de route « inutiles » et fatigantes : bouchons, autoroute, aller de A à B facilement, redonner de la mobilité aux personnes âgées, etc. Pour les petites routes, il y aura toujours la possibilité de déconnecter et de revenir à ce vil plaisir automobile qui consiste à prendre un maximum de g latéraux.

Aujourd’hui, la Mercedes-Benz E 400 4MATIC Coupé arrive presque à faire tout cela dans une fluidité de régulation impressionnante et plutôt qu’un concert de grognements passéistes, cela mérite à coup sûr un coup de chapeau.

En parlant de grognement, il faut aussi parler du moteur équipant ce petit coupé blanchâtre qui file à belle allure de virage en virage. Il s’agit là du V6 3L dans sa déclinaison sortant 333 ch et 480 Nm dès 1600 tr/min. Il est accouplé à une boîte 9 rapports et à la transmission 4MATIC.

Puisque l’on parle d’un grand coupé luxueux, n’attendez pas de lui une musicalité extravertie, plutôt une ronde et douce mélodie. C’est d’ailleurs ce qu’il délivre, quel que soit le mode de conduite engagé. Loin de hurler, il ronronne et gronde, selon que l’on roule sur le couple ou en allant chercher la zone rouge. Cela ne sert d’ailleurs pas à grand chose puisque la puissance maximale est atteinte à 5250 tr/min.

Bref, ce V6 est onctueux, bien plein et gavé de couple de 2000 à 5000 tr/min. Il ne faut pas croire qu’il soit paresseux pour autant puisqu’il envoie la E 400 à 100 km/h en à peine 5.3 secondes, ce qui est plus que raisonnable pour une auto dépassant les 1800 kg, voire 1900 avec deux passagers plus ou moins dodus.

Cette E 400 Coupé, c’est donc plutôt une force tranquille, légèrement musicale, flatteuse mais tout sauf bruyante au long court et sachant sur quelques relances en seconde ou en troisième faire montre d’un brin d’extraversion. En clair, c’est un daily parfait et luxueux, flirtant avec les 100k€ et par conséquent pas un daily pour tout le monde… Pour les concerné(e)s en tout cas, c’est convaincant.

L’élégance de ce V6 se retrouve aussi dans la boîte 9G-Tronic que l’on peut commander au volant et qu’on engage toujours via le petit levier décidément bien désuet – un peu comme la commande de frein à main sous le volant. Les palettes tombent bien sous la main mais à dire vrai, je ne m’en suis quasiment pas servi.

Ce n’est pas que la boîte réagisse mal à la commande manuelle, non, c’est juste que la commande automatique se débrouille à merveille quel que soit le mode engagé, que l’on soit en train de cruiser dans la campagne auvergnate ou que l’on cherche plutôt à doubler la vitesse légale sur une route parfaitement déserte et dégagée.

Jamais cette boîte ne semble défaillir en tirant trop haut un rapport, en rétrogradant trop tôt ou mal, en passant un rapport à la montée trop tôt, elle joue du couple, de l’angle au volant et de la pression sur l’accélérateur avec prévenance et anticipation, permettant de se concentrer sur le reste. Une vraie réussite seulement faussée par le mode Sport+, très réactif, le seul où le mode Manuel prévale.

Parlons maintenant de la suspension et l’amortissement. Mon modèle d’essai était équipé de l’option Air Body Control et j’ai pu vérifier une nouvelle fois l’excellence de ce petit bijou hydropneumatique, même avec deux paires de roues AMG chaussées en gommes collantes à taille basse. Les mouvements de caisse sont tout à fait gommés, conservant une assiette horizontale idéale dans les courbes, jouant en cela bien avec les sièges au maintien parfait.

Le filtrage sur routes dégradées était également excellent, tout comme l’absorption des raccords sur autoroutes. En clair, je ne lui ai pas trouvé grand défaut, plutôt l’inverse, faisant des longs trajets (1735 km parcourus tout de même !) un réel plaisir en terme de confort, doublé d’une insonorisation presque parfaite aux bruits d’air et de roulement.

Une fois la cavalerie du V6 lâchée, la caisse de se désunit pas non plus, remontant ce qu’il faut d’informations et gérant les changements de cap avec sérieux à défaut d’amusement. Ce n’est bien sûr pas la vocation première d’une E 400 Coupé mais un peu plus de « fun » aurait pu être le bienvenu en mode Sport+. Mention + en revanche pour la possibilité de relever l’auto pour aller garer la voiture dans un parking pas forcément prévu pour ce genre d’engins.

Reste la question des freins et de la direction. Pour les premiers, il n’y a pas grand chose à dire si ce n’est quelques crissements inopportuns en refroidissement, rien de terrifiant toutefois et surtout repérés de façon transitoire et après une utilisation vraiment intensive. Le toucher de pédale de frein est franc à défaut d’être vraiment sportif et la consistance se tient bien sur de longues sections de départementales avalées à bon rythme. Je n’irais bien sûr pas mettre cette auto sur un circuit et je n’irais pas non plus la conduite comme une WRC mais pour un usage standard mâtiné d’un brin d’enthousiasme, le système de freinage fait largement son office !

La direction est du même acabit, franche mais pas trop collante une fois les modes sportifs engagés, clairement sur-assistée et à mon goût désagréable en mode Confort. Le mode Individuel est en cela parfait qu’il permet de configurer la direction et la suspension en Sport tout en conservant le moteur et la boîte en mode Eco. On peut alors jouer des déconnexions moteur / transmission pour économiser de l’essence tout en ayant un toucher de volant et de route satisfaisant.

Un vrai plus sur cette auto qui m’a permis de prendre du plaisir en roulant tout en tenant une consommation moyenne de 10.6 L/100. Certains me diront que c’est beaucoup et je leur rétorquerai que l’on parle d’un coupé de presque deux tonnes, utilisant un V6 de plus de 300 chevaux…

Reste la question finale, celle du plaisir de conduire. La E 400 Coupé est-elle aussi capable de procurer cela ? D’une certaine façon, oui. Ce n’est pas une puriste, pas une super sportive et sa connexion à la route n’est pas la meilleure du monde, forcément. La Classe E reste une berline luxueuse, technologique et feutrée et cela se ressent un peu partout dans les choix qui ont du être faits quant au comportement général de ce modèle, tout puissant et sportivement dessiné qu’il soit.

Le V6 est très performant mais se fait discret du côté des vocalises. La boîte est toujours prévenante et ne claque que si on force vraiment le trait. Les freins assurent une grosse moyenne en km/h, mordent mais ne font pas mal à la nuque. Enfin, le train avant, précis et tournant de façon volontaire, se place facilement au moyen d’un volant joliment revêtu d’alcantara, son pendant arrière ne cherchant quant à lui jamais à déborder de plus de quelques degrés sauf à faire n’importe quoi.

Voilà qui va flatter le conducteur ayant envie de brûler un peu de gomme sur de petites routes où le gabarit de l’auto ne se ressent pourtant presque pas sans jamais lui faire peur et sans jamais lui massacrer une lombaire, un genou ou un poignet.

C’est finalement la prouesse de Mercedes-Benz sur cette voiture : préserver cette tendance de luxe, calme et volupté intrinsèques à l’auto mais lui donner en passant un zeste d’engagement supplémentaire. Cela se fait au moyen d’une direction et d’une suspension franches et bien faites mais toujours filtrées des plus gros retours afin de ne jamais brusquer le conducteur ou le connecter trop franchement à la route.

Sur une AMG, ce serait criminel. Sur une E 400 Coupé, c’est à mon sens le parfait équilibre qui permet sûrement d’avoir le meilleur des mondes. Le luxe, le calme et la technologie d’une Classe S sans le tarif. La sensation de légèreté et de dynamisme d’une Classe C avec ce petit brin d’engagement qui n’est certes pas du BMW mais qui tend vraiment à générer des sourires sur le visage du conducteur tant qu’il n’a pas à manœuvrer les lourdes portes ou accéder aux places arrière, pour pas beaucoup plus cher qu’une C.

Cela ressemble donc bien au meilleur des mondes si l’on regarde la gamme Mercedes et je dois dire que si je m’attendais à voyager en toute quiétude à son bord, je ne pensais en revanche pas m’amuser d’une certaine manière sur les petites routes, ce sans exploser ma consommation. Un daily, cher, mais un daily.