Essai – Audi SQ7

Soyons bien clairs : je n’aime pas l’Audi Q7. Trop gros, trop grand, pas fan dès le premier jour de son design extérieur, en rupture avec les autres productions de la marque et assez déséquilibré à mes yeux par rapport à d’autres véhicules du même gabarit. Je ne l’avais donc jamais demandé à l’essai, n’y trouvant pas de quoi m’enthousiasmer ou souhaiter mettre mon argent dans le réservoir.

Sauf que l’Audi SQ7 est arrivé et que j’ai changé d’avis pour quelques raisons évidentes : le dynamisme et la technologie. J’avais il y a quelques temps déjà fait le même cheminement avec le SQ5. Je voulais à l’époque voir ce que Audi était capable de faire avec un gros SUV, un gros moteur diesel et du travail sur la liaison au sol.

Bis repetita avec un encore plus gros SUV, un encore plus gros moteur diesel et encore plus de travail sur la liaison au sol. Je ne pouvais pas le laisser de côté, celui-ci.

Extérieurement, je n’ai pas changé d’avis. Je n’aime toujours pas mais je suis à minima sorti de la détestation première. Il paraît qu’on finit par s’y habituer, voire à l’aimer, je n’en suis pas encore là mais qui sait, cela pourrait bien finir par arriver ! L’Audi SQ7 se distingue fort logiquement des versions moins puissantes via quelques attributs évidents de sportivité.

Le bouclier avant est revu avec des ouvertures plus larges et agressives, la calandre avec son cerclage toujours aussi large est un peu plus méchange et le regard en matrix LED est affuté en dessous d’un capot aux nervures qui me semblent plus marquées. Je ne sais pas vraiment. Ce n’est pas « méchant », loin s’en faut, c’est simplement un peu plus dynamique et surtout c’est particulièrement discret.

Les roues sont un peu moins discrètes, dira-t-on. Ce n’est pas tant leur gabarit à elles qui impressionne mais plutôt les énormes pinces de rouge vêtues qu’elles abritent ! Le V8T sur les ailes avant et la légère boursouflure des ailes ne trompe pas non plus son monde et si les regards se portent aisément sur le SQ7, ils ont surtout une certaine propension à se figer à la vue de ces signes latéraux.

Toujours sur les flancs, on retrouve un classique Audi sur les version S, à savoir les rétroviseurs passés à la finition aluminium. Les ailes arrière sont aussi quelque peu déformées par les voies élargies mais ce que j’ai apprécié, ce sont ces plaques quattro chromées que je trouve particulièrement réussies.

A l’arrière, pas grand chose à signaler si ce n’est que l’auto est capable de générer une éclipse solaire tant elle est massive ! On retrouve le badge SQ7, de très jolis feux, une quadruple sortie d’échappements intégrés à un grand pare-chocs surligné de chrome et voilà ! Oh, il y a les lettres TDI aussi. De quoi faire hurler Anne Hidalgo quand j’ai fait 3 fois le tour de l’hôtel de ville de Paris en prononçant autant de fois son nom.

Passons rapidement à l’intérieur car là-aussi, cela va être compliqué de vous raconter quoique ce soit tant c’est… parfait. Autrement dit, à défaut de tomber dans l’adoration et d’aligner les superlatifs, on va faire simple : c’est beau, c’est propre, c’est fini sans aucune anicroche, les matériaux te tirent des sourires appréciateurs et le Virtual Cockpit est et reste le meilleur système d’infotainment sur le marché pour le moment.

Autrement dit, Audi part d’une bonne base, n’en déplaise à beaucoup et quand on prend donc ce savoir-faire de la marque et qu’on ne limite pas vraiment le budget, ça donne un habitacle quasiment irréprochable et une ergonomie qu’il est difficile de critiquer. On pourra toujours dire que le levier de boîte n’est pas idéalement placé et limite l’accès à la zone tactile centrale mais comme de toute façon, tout ou presque peut se passer sous les yeux du conducteur, ce n’est pas si grave.

Du carbone, de l’aluminium, du cuir épais, une belle moquette, de l’alcantara, de beaux sièges (tiens, pas massant, dommage), un affichage tête haut bien fichu, des aides à la conduite plutôt bien dosées et… c’est bon je peux arrêter de vous parler de l’habitacle ? Oui ? Merci. Seule inconnue : le modèle de base coûte un peu plus de 100k€, mon modèle d’essai devait plutôt toucher les 170k€… Audi se fait tout de même méchamment plaisir sur les options, là.

Allez, ce n’est pas tout ça, mais parlons maintenant de celui qui m’a fait envoyer mon mail de demande d’essai : le mo-teur. C’est un V8. Diesel. Il cube 4 litres et développe la coquette somme de 435 chevaux, disponibles à 3750 tr/min et jusque 5000 tr/min. Le couple s’établit quant à lui à 900 Nm (non, ne toussez pas, vous avez bien lu) disponible quant à lui dès 1000 tr/min (ne toussez pas de nouveau, ça va mal se finir cette histoire).

Ce gros bloc se distingue des autres pour une raison : une batterie située dans le coffre câblée en 48V quand le reste de l’industrie utilise généralement du 12V (pour le moment, hein, le 48 c’est la future norme). La batterie, c’est une chose, ce à quoi elle est reliée en est une autre. Un compresseur électrique. Qui alimente deux turbos qui fonctionnent séparément ou de concert. C’est une première, cette électrification d’une partie de la suralimentation et cela permet tout simplement d’anéantir le temps de réponse desdits turbos.

Autrement dit, quand je parle de 900 Nm disponibles dès 1000 tr/min, c’est grâce à cela et ce couple reste disponible jusque 3250 tr/min. Ce n’est plus une courbe de couple, c’est une ligne horizontale. Combinez cela à la meilleure des boîtes automatiques disponibles chez Audi, une Tiptronic 8 et vous obtenez un ensemble d’une force onctueuse capable d’arracher n’importe quel bitume !

Au démarrage, cet ensemble se montre discret. Un léger vrombissement, tout juste perceptible dans l’habitacle. Avec le mode Dynamic activé et l’échappement factice un peu boosté, on entend un peu plus mais cela assez, faux, je ne vais pas vous vendre le contraire. C’est sympathique, sûrement un peu trop présent à l’extérieur d’ailleurs et vous aurez surtout tendance à agacer vos semblables ce faisant. Non, vraiment, profitons de l’habitacle, du silence, de l’onctuosité de tout cela.

Des vibrations dans l’habitacle ? Aucune. Des bruits parasites venant du moteur ou de la boîte ? Non. Des bruits de roulement ? Éventuellement si vous descendez dans une ornière à 130 km/h. Sinon rien. L’Audi SQ7 est un monstre de confort malgré ses roues plus grandes et sa monte en ContiSportContact un peu plus taille basse que d’ordinaire.

Sur autoroute ou sur petites routes, mêmes dégradées, le confort à bord est royal et le système son, agréable à défaut d’être au niveau de celui de Volvo et Mercedes, gomme les quelques éventuels bruits qui pourraient tenter de franchir les isolants copieux qui vous coupent du monde normal. Vraiment bluffant.

Les mouvements de caisse, en confort comme en dynamique, sont particulièrement bien gommés par la suspension pilotée et les barres stabilisatrices électromécaniques. L’énorme machine se stabilise sur ses appuis sans jamais donner l’impression de se vautrer sur ses gommes qui encaissent le latéral sans sourciller, les roues arrière directrices ajoutant à la note globale dans le sinueux.

La question, à partir de ces premiers constats qui donnent le sourire, c’est jusqu’où peut-on aller ? Les limites semblent loin, bien loin, mais a-t-on réellement envie de les trouver au volant d’un SUV dépassant allégrement les deux tonnes ?

La réponse est bien évidemment non, à moins de vouloir couper une dizaine d’arbres avant de s’arrêter ! C’est peut-être bien la limite de l’exercice technique qu’est l’Audi SQ7. La liaison au sol est là, les sensations sont plutôt bonnes sans être particulièrement engageantes ou gratifiantes mais il manque un peu de toucher dans la direction et dans le train avant pour se sentir vraiment bien et vouloir aller plus loin, malgré une transmission quattro toujours efficace et rassurante.

L’Audi SQ7 est assurément dynamique. Son 0-100 s’établit en 4.9 secondes, jugez plutôt ! Les reprises sur route ou autoroute sont titanesques. Le 50-90 en sortie de village, le 80-130 sur autoroute quand une chicane mobile se met à freiner pour rien et autres exercices de ce type sont pour ce SUV pas comme les autres des formalités d’une banalité sans nom.

C’est peut-être là la vraie qualité de cette voiture, cette poigne gainée de velours qui semble pousser sans jamais s’arrêter dans le bas de votre dos, catapultant l’auto sans sourciller.

Le fait est aussi qu’au bout de tout juste 465 km, j’ai consommé 11 l/100 de moyenne. C’est une paille si l’on considère la taille de l’engin, sa motorisation et le rythme général assez élevé que j’ai mené, sans jamais être vraiment à l’attaque. Je pense qu’un 8-9 litres aux 100 kilomètres est atteignable, en roulant coulé, en mode Confort et sur le couple, entre 1000 et 3000 tr/min.

Ce moteur diesel, le plus puissant du marché jusqu’à la prochaine réplique de la concurrence, est un petit monstre silencieux, poussant et tractant cette énorme masse avec une force tranquille, appuyée, constante. Il n’y a jamais vraiment de violence, uniquement ce réservoir de remise en vitesse qui semble toujours rempli, disponible à la pédale sans aucune latence.

La prouesse est là, au delà des qualités dynamiques un peu perfectibles en terme de ressenti mais de toute façon fondamentalement liées à la nature de la voiture. Les AMG, M et S/RS auront beau toujours se démener, un SUV reste un SUV et n’atteindra jamais l’engagement et le plaisir de conduite d’une berline, d’un coupé ou d’une supercar. Il en va de même pour l’Audi SQ7 qui s’il n’a pas à rougir une seconde, ne pourra jamais vraiment se battre à armes égales avec les autres.

Parfait pour cruiser, parfait pour rouler à allure engagée sans être agressive, l’Audi SQ7 est une machine destinée à distiller sa force dans un calme absolu, laissant dans son sillage bon nombre de renifleurs et oubliant le monde qui l’entoure pour transporter vite, bien et sans fatigue ses cinq ou sept occupants.

Oubliez les freinages appuyés, oubliez les inscriptions nettes à la direction, il en est capable par moments et s’en sort même plutôt si on regarde au global ses qualités dynamiques mais est-ce que c’est vraiment ce que l’on veut faire au volant d’une telle machine ? Non. Les freins vous abandonneront bien vite et la direction n’a pas le bon niveau de ressenti pour jouer avec les millimètres.

Alors voilà, achetez-le pour vous faire un énorme plaisir, pour posséder une véritable vitrine technologique et pour oublier le reste du monde qui ne verra de vous qu’un grand hayon et de jolis feux rouges qui glissent vers l’horizon avec une nonchalance absolue.