Audi Endurance Experience – le goût de la Finale en Laponie

L’Audi Endurance Experience que j’ai vécue au Mans, c’était un rêve devenu réalité, une expérience humaine magnifique et un souvenir de grande qualité. Les rêves de grande qualité, c’est finalement bien rare. C’est un peu comme ce rêve érotique si parfait dont vous vous réveillez chancelant et dans lequel vous adoreriez vous replonger. Sauf que ça n’arrive jamais, alors vous finissez par abandonner l’idée et par vous satisfaire de ces singularités.

Voilà mon état d’esprit en ce 6 décembre au matin quand arrive un mail : « Et si on partait en Laponie ? ». La Laponie, je ne l’ai jamais calculée quand j’étais au volant de notre A3 au Mans, je n’y ai pas pensé, ce n’était pas une cerise, pas un gâteau, c’était quelque chose de différent qui allait être vécu par d’autres équipes de blogueurs et par les méritants vainqueurs des épreuves de sélection. Il en a vraisemblablement été décidé autrement et ce mail, ce fut le début d’un nouveau rêve, d’un nouveau goût.

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La Finale, le goût de la Finale. Ce sourire niais, stupide et ce sautillement imbécile quand on l’annonce autour de soi avec l’air béat du jeune parent qui ne comprend finalement pas trop ce qu’il lui arrive mais qui jouit, à raison, d’un bonheur incroyable. C’est très agréable, ce goût, tel que. Cela pourrait en revanche devenir presque désagréable de l’entendre énoncer s’il ne s’agissait que de cette béate satisfaction mais fort heureusement, il n’en est rien. C’est tellement plus, c’est encore tellement d’émotions vécues en équipe, avec Aliette, Nicolas, Thomas, Antoine et toujours notre empreint d’abnégation Steven Le Lann (le fol, s’il avait su) !

La Finale, c’est d’abord prendre l’avion et arriver dans le noir alors qu’il est tôt. Luleå. La Laponie. 65° Nord. Un circuit de glace et de murs de neige tracé sur une piste de rallycross, vallonnée, tortueuse et enchaînant les ciels et les creux, les sections dans les arbres enneigés et les belles vues sur les alentours. Tout cela, on ne le voit bien sûr pas le premier soir. Le premier soir, il fait grand nuit, on arrive toute (oui, Aliette était la seule femme et le premier germe je l’espère d’une plus grande parité l’an prochain !) et tous à l’aéroport puis à l’hôtel dans le centre de Luleå, on récupère le généreux équipement fourni par Audi et son partenaire Rossignol (la collection 1907 est testée et approuvée – cette phrase n’est pas sponsorisée) qui nous a bien sauvé la mise pendant le weekend et on file manger au restaurant, tous ensemble. Des sourires, partout. Des rires, beaucoup et à toutes les tables. L’ambiance est détendue, amicale, le but est atteint et chacun déguste à petites bouchées et gorgées une des nuances de ce goût si particulier qui n’est pas celui de la victoire, mais pas loin.

Lendemain matin, je crois bien que la nuit a été courte mais finalement bien sage. Le dernier verre qui a chauffé mes veines s’est fait la malle depuis longtemps et un quelconque reste s’estompe très vite, alors même que je sors de l’hôtel pour m’engouffrer dans le bus. Il fait -14°c en température ressentie, une paille par rapport aux 10 jours précédents où la température taquinait les -30°c en toute décontraction. Le soleil n’en finit pas de se lever sur un ciel d’une multitude de nuances de bleu, de rose, de gris et de blanc. Le pastel est partout et ne quittera quasiment pas le premier tiers de la journée, avant que le soleil ne daigne dans un arc bien trop court pointer le bout de son astre. Le réceptif et le circuit sont là, nos tipis avec poêle à bois aussi, les braseros se consument doucement dehors et les voitures prennent la pose, attendant sagement, tous clous parés, que nous soyons briefés par Fred et ses équipes, dans un petit parfum de fumée qui enchante narines et papilles.

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Briefing, simple, efficace. L’enjeu est toujours un mélange de sécurité et de plaisir et les mots sont choisis avec soin pour nous rappeler les règles du jeu, nous rassurer mais aussi nous enjoindre de prendre du plaisir, beaucoup de plaisir ! Le menu est simple : une piste de 1800 mètres dont la largeur évolue entre 6 et 20 mètres, des pneus cloutés à l’avant (130, 2.8 mm) comme à l’arrière (130, 2.4 mm pour un arrière plus joueur), des pressions augmentées pour limiter les surfaces de contact au sol et faire ressortir les clous et enfin un mode d’antipatinage soit off (mauvaise idée, on est bien plus lent) soit en Sport avec absence d’antipatinage (rire coquin) et un ESC retardé (quand même, ça peut servir parfois). La machine est connue, c’est évidemment notre bonne Audi A3 avec son 1.8 TFSI et sa boîte à double embrayage. L’arceau est toujours là, le coupe-circuit aussi et l’extincteur est en bonne place ! Y a plus qu’à.

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Alors bon, on ne part pas en course ou en qualifications où quoique ce soit, hein. Steven nous l’explique clairement, tout comme Fred l’avait fait auparavant. L’objectif est moins la course que le plaisir, ici et c’est le roulage qui est privilégié dans un premier temps avec quelques 5h30 de roulage en relais ! Le chrono est certes là pour donner des indications mais ce qui compte c’est l’apprentissage et les sensations de glisser, glisser, glisser, chercher le grip et se faire plaisir. Alors on glisse. Le premier tour est bien logiquement… prudent. Quelques fonds de gaz pour tester l’accroche, quelques freinages pour vérifier que oui, les clous, ça fonctionne plutôt bien. Les premiers conseils tombent après un tour en passager et ils sont doux et prévenants, incisifs parfois pour marquer un point et les compliments ne sont pas rares pour encourager les progrès. Les sensations reviennent vite en tout cas pour ce qui me concerne et je me sens assez rapidement à l’aise bien que faisant encore pas mal de petites erreurs, de manquements d’appréciation, fort heureusement de peu d’excès d’enthousiasme ! La conduite sur glace demande une concentration continue afin de percevoir les multiples changements d’adhérence, de corriger en temps réel mais aussi d’agir avec ce qu’il faut d’avance pour diriger l’auto, celle-ci demandant forcément un peu de temps avant de pivoter autour de son appui et de son axe. Le goût de la glisse est inimitable et c’est délicieux !

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Il faut dire que le circuit est remarquablement taillé avec un premier gauche en descente sur un droite serré qui s’ouvre légèrement pour s’engouffrer sur une grande courbe gauche, large de la fameuse vingtaine de mètres ! On arrive ensuite dans une partie technique avec un long droite où des rigoles se forment et entraînent l’auto à l’extérieur. Il faut coller à la corde quitte à racler un peu la neige du mur afin de garder le grip au pneu avant droit et faire pivoter l’auto avant de prendre l’épingle gauche qui rentre dans la forêt. Gaz, gaz, gaz, 100 km/h maximum certes mais un léger gauche dans lequel il faut rester sur le gaz pour finir par lécher le mur droit au ras des arbres. Frein. Le freinage le plus délicat et le regard qui a tendance à regarder l’angle droit du circuit pour aller y plonger la voiture mais non, il faut plonger corde et y rester doucement avant d’ouvrir à fond sur un splendide enchaînement gauche en dévers, droite en remontée sur double droite et la remontée qui continue sur un gauche très étroit ! C’est le moment que choisit le soleil pour se montrer alors que la voiture soubresaute dans les rigoles et qu’il faut prendre les freins sur un beau droite. C’est interminable. Fatiguant. Ce n’est pas fini ! Gauche compliqué, large, rester au centre et ne jamais jamais se laisser embarquer au large, on poursuit la remontée en longeant les arbres pour aborder la partie la plus lente du circuit, celle où nombreux sont ceux à être restés plantés dans la neige ! Le gauche serré d’abord et ce droite si serré, si piégeur et en très légère descente. Un autre droite et une belle épingle à gauche. Ligne droite, stands, on peut aussi avoir pris le raccourci juste avant cette section pour doubler un concurrent un peu plus lent. Enfin, un tour. En faire cinq ou six en étant constant est un exercice complexe, fatiguant. Mais bordel, quel putain de pied, cette piste !

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La session s’achève au bout de deux mi-temps coupées par un rapide déjeuner, l’occasion d’un premier debriefing avec Steven, en sus de tous ceux déjà faits entre nous, au fil des tours et des relais de quelques tours. Tel virage, tel freinage, telle sensation, tel sentiment d’avoir bien fait cet appel / contre-appel tout en minimisant la glisse inutile au chrono. Le sourire est là, l’appréhension aussi, toujours un peu. Toujours peur de voir intervenir les RS3 et RS4 qui sortent les voitures des murs quand c’est possible. Toujours peur de faire LA connerie et de perdre ses moyens pour récupérer l’auto, quand bien même on roule tout sauf vite ! Alors on partage, on rigole et on se taquine, encore et encore. Elle était belle, cette équipe de blogueurs. Différente de celle du Mans, plus hétéroclite et éclectique finalement. Un joli moment. (mais non je ne mets pas la photo de l’équipe, je me déteste dessus)

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La journée se termine doucement mais sûrement, le soleil se faisant interminablement la malle derrière les sapins qu’il a tout juste coiffés pendant quelques heures de chaleur insoutenable. On repart pour une dernière session chacun, afin de voir les chronos, de décider une bonne fois pour toutes qui aura l’insigne honneur de faire la super-pôle. La quoi ? Super-pôle. De celui qui va devoir faire un tour à bon rythme pour voir, un tour chronométré et enfin un tour de décélération à bon rythme aussi, le tout sans se planter et avec un état de piste forcément dépendant du tirage au sort de l’ordre de passage en piste. L’enjeu est donc de croiser fort les orteils gelés pour être dans les premiers à passer mais également de faire le meilleur tour possible ! Double chaleur. C’est moi qui m’y colle. Bon, les gars, entre les départs la nuit dans l’eau et les tours chronométrés la nuit sur glace, je vois que vous m’aimez bien hein. Par contre avec ces deux conneries, moi, j’ai perdu 10 ans de vie côté cœur. Mmmm, ouais, ça en valait la peine. Le goût du stress, de la concentration, c’est aussi ça, oui, ce moment de rêve.

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Tirage au sort : 9ème sur les 12 voitures. Les 3 autres derrière sont parmi ceux ayant signé les meilleurs temps en essais libres. Bon bon booooon… Steven ne lâche rien, pousse, conseille, j’ai juste envie de lui filer le volant pour qu’il les enrhume. Non je déconne, il a signé pour trois jours côté droit, il assume, merde. Il fait nuit, vraiment et c’est en fait bien mieux comme ça avec les feux qui découpent à merveille la silhouette des murs de neige et des arbres. Le passage dans la forêt à 100 km/h dans la nuit ? Magique. Une des saveurs les plus inoubliables de cette Finale, à l’aune globale de l’Audi Endurance Experience ! Verdict : 6ème temps mais les 3 suivants font mieux de quelques dixièmes. On partira donc 9èmes, impossible sauf miracle de jouer la victoire finale mais bonne nouvelle : on est seconds dans la catégorie. Jouable, jouable, jouable !

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Parce que oui, bon an mal an, on se (re)prend au jeu de la compétition, du chrono, des dépassements, de renifler l’arrière de la voiture qui précède pour le pousser à la faute et au mur, pour dégager l’espace qui va bien pour passer ou utiliser le raccourci à bon escient ! C’est la course le lendemain et forcément, même si c’est déjà une victoire d’être là, on veut avoir cet autre goût de Finale, celui de la victoire, des endorphines qui coulent à flots et des sourires qui mordent les pommettes. La soirée est tout aussi agréable que la première même si la fatigue est là et l’appel du lit se fait insistant. On pense déjà un peu à demain, au départ. C’est d’ailleurs plus simple, ici : un écart de 10 secondes entre chaque voiture pour le départ. C’est à mon sens un peu trop mais c’est finalement bien sage pour éviter un drapeau rouge dans les deux premiers tours ! Je pars donc le couteau entre les dents avec la volonté de manger du temps dès le début, un maximum. Facile à dire, plus ardu à faire car les erreurs sur glace se paient en secondes, en minutes si on est malchanceux. Je remonte, j’en reperds un peu, je remonte un peu. Une belle session en tout cas mais pas de dépassement, pas dès le début. Je sors de l’auto, soulagé et je file voir le tableau des positions et temps. Second temps en piste. J’aime bien le marteler et aussi le redis-je : je ne suis pas pilote. En revanche, ça fait toujours plaisir de voir ce genre de choses !

 

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Le jeu est ensuite simple : attendre et voir. Voir ce que les collègues font, voir ce que les autres font, guetter les sorties du RS4, croiser les doigts, regarder les temps, décroiser les doigts parque ça meule un peu quand même, voir soudain la 9 plantée sur un mur de neige. Bordel ! C’est foutu, je me dis, on sera 4èmes de la catégorie. Ce n’est pas grave en soi, on le sait, on ne joue rien ici mais quand même, on y pense ! La RS4 intervient vite et sort la voiture. Tour suivant, c’est la 12 qui se plante au même endroit. IL Y A UNE JUSTICE DANS LE MONDE ! (rien de personnel, numéro 12, vous étiez adorables par ailleurs)

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Deux tours plus tard, le drapeau rouge se lève. Les voitures viennent s’arrêter petit à petit. Je ne vois pas la 9. Antoine ne voit pas la 9. Aliette ne voit pas la 9. Thomas ne voit pas la 9. Où est Nicolas ? Où est Steven ? P.u.t.a.i.n. Le goût de la Finale, là, c’est de l’inquiétude, un regard qui se vide et un pouls qui part dans tous les sens. Je croise Fred (ou Dominique ? je ne sais plus) qui me dit que la 1 et la 9 se sont cartonnées mais que tout le monde va bien, que les voitures sont à priori mortes. Le soulagement et la redescente d’émotions. Ils reviennent avec la RS4, ils sourient, ils vont bien. Steven a un peu mal au niveau du harnais, Nicolas est désolé. Il a presque eu le droit à une baffe, le couillon, pour la peine. La 1 était tankée dans un mur, roue arrière droite cassée, en plein milieu de la zone de forêt dont je parlais plus haut. Quasiment inévitable, une petite erreur de relâcher de gaz, trop tard. Pas sa faute, c’est le premier réflexe. Ils vont bien, il y a une voiture de rechange parce que celle-ci a pris un arbre à l’avant et une voiture sur le flanc droit. Ils vont bien, c’est tout ce qui compte.

A partir de là, ce n’est plus la même histoire et bizarrement, après toutes ces péripéties, on en reviendrait presque au tour premier conseil du briefing : prendre du plaisir, oublier la course, savourer. Alors c’est ce que j’ai fait, du premier au dernier mètre de mon dernier relais à bord de cette Audi A3, sur une piste totalement changée par rapport à mon dernier tour de départ, avec des rigoles, de la tôle ondulée, des paquets de neige à aller chercher pour prendre le grip, quelques beaux travers pour le plaisir et puis le flash qui revient régulièrement en tête : tu es en Laponie, tu fais une course de 3 heures sur glace, tu as un casque, une combinaison, un HANS, un copilote, c’est… c’est un putain de rêve.

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L’arrivée enfin, l’émotion, le sourire forcément un peu triste de notre équipe, la joie incroyable et réjouissante des vainqueurs, la sensation d’avoir encore vécu une aventure extraordinaire, d’avoir mangé une belle grosse part du gâteau du Mans et en même temps, de façon absolument inattendue, de s’être vu offrir une cerise de la taille dudit premier gâteau.

Pincez-moi, je ne sais pas, faites un truc. J’ai tellement de goûts en bouche, celui des rires de ces deux équipes, celui de l’affection de Steven, de Sabrina et Florian, celui des plaquettes chaudes et des disques qui tremblent, celui de la glace lors des premiers pas sur le circuit, celui du mur de neige qu’on découpe ou celui du choc dans mon aile au Mans, celui de cette forêt nocturne à 100 km/h et de la Dunlop qui se découpe entre les gouttes de pluie nocturne, celui du pastel infini de l’horizon, celui de cette victoire de catégorie au Mans, du podium légendaire sur lequel on pose un pied timide et respectueux, celui d’avoir évité les murs et signé des temps convenables, celui enfin de la course, de l’excitation intense du départ, de la montée dans la voiture, du relais que l’on veut parfait et enfin du plaisir automobile, brut, accessible, grâce à l’Audi Endurance Experience qui m’a été offerte et dont je ne suis pas prêt de me remettre.

Mais cette fois-ci, le rêve est terminé. Pour de bon.

Reste à acquérir le concernant la même sagesse que celle acquise pour les rêves érotiques.


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